Yainville, le village d'Edwinus
Quelques repères chronologiques...


 Il nous faut remonter jusqu'à l'ère quaternaire pour planter le décor de l'histoire de Yainville. Voici trois millions d'années, dans la plaine qui mène à Duclair, coulait alors une rivière. Elle se jetait à Claquevent. C'était le cours inférieur de l'Austreberthe. Peu à peu, du côté de Duclair, la Seine finit par étendre son méandre pour capturer cet affluent. Du coup, le lit de l'Austreberthe s'assécha. Longtemps, les hommes rêvèrent au retour de l'eau dans la vallée morte. Vauban aura l'idée de creuser un canal qui aurait permis de gagner plusieurs kilomètres pour la navigation. On commença à creuser sur 500 mètres à Saint-Paul. Mais ceci est une autre histoire...

Le fossé Saint-Philibert

La nature ayant privé la presqu'île de Jumièges de son caractère quasi insulaire, c'est un ouvrage humain qui allait la lui redonner. On édifia le long de l'ancienne rivière un immense talus qui barrait toute l'entrée de la péninsule à l'endroit où elle est le plus étranglée. Il est connu sous le nom de Fossé Saint-Philibert. Il fut édifié à la fin de l'âge de Bronze, remanié à la fin de l'âge de Fer, rehaussé et consolidé au VIIe siècle.

A l'aube de l'ère chrétienne

Nous voilà maintenant dans la presqu'île à l'ère chrétienne. Est-elle en Pays de Caux? Les érudits vous diront que c'est la Rançon, qui, à 15 km d'ici, en marque la limite sur la commune de Saint-Wandrille. D'autres tracent la frontière cauchoise plus près de nous, à Duclair, sur l'Austreberthe. La presqu'île de Jumièges est de toute façon une entité singulière, un monde à la fois fermé mais aussi rayonnant sur l'extérieur. Et ça, on le doit à saint Filibert quand il arrive ici, en 654, pour y ériger un monastère.
TOPONYMIE

En 1025 et vers 1080, notre village s'appelait Ewenvillam, la ville d'Edwinus. C'était un nom d'homme d'origine germanique ou anglo-saxonne. Les terminaisons en ville ont particulièrement fleuri aux Xe et XIe siècles. 

En 1138 et 1156, les textes mentionnent Eudonis villa. 

On retrouvera aussi Endonis Villa, Endo de Stella, Vvenvilla, Guenvilla... Ces deux dernières appellation signifient le village dépendant du lieu appelé Guen.

Mais l'appellation d'origine, Ewenvillam, semble avoir perduré. En perdant sa consonne initiale, Ewenvillam a donné différentes formes au fil des siècles et des manuscrits: Winvilla, Yenville, Ouainville, Jainville, ÿainville, Gainville... A rapprocher d'Hyenville, dans la Manche, qui se disait Heenville au XIVe siècle. Près de Cany est un Ouainville, écrit Ouinville au XIIe siècle, et qui doit son nom à l'antroponyme germanique Audinus ou encore Odinus, dont dérive le nom de famille Ouin qui fut porté chez nous. Il existe par ailleurs un hameau du nom d'Yainville à Emanville, dans l'Eure. Le nom de famille Dyainville, D'Yainville, a été porté dans notre région.

 

VIIe siècle

654: Fondation de l'abbaye de Jumièges, établissement de la domination des moines sur la presqu'île. Il va sans dire que l'histoire de Yainville est intimement liée à celle du monastère qui régentera désormais la vie de la région. Nous n'évoquerons pas la vie propre à cette institution. Mille ouvrages en racontent minutieusement l'histoire. Nous ne parlerons ici que des événements qui touchèrent directement nos aïeux. En cela, la venue de Filibert à Jumièges fut capitale. Elle allait imprégner leur tempérament pour des siècles. Filibert laissa après lui des légendes que se racontaient de génération en génération.

Saint-André, le Yainville actuel, Saint-Martin et Saint-Nicolas, deux hameaux du Trait, formeront une seule et même paroisse: Trajectum Ewenvillam, le passage d'Yainville. Par déformation, Trajectum allait donner son nom au Trait. 

IXe siècle

840: Les moines désertent la presqu'île avec l'arrivée des vikings qui mettent le pays à feu et à sang, ruinent les édifices. Il en est certainement de l'église de Yainville,  à l'origine un simple oratoire composé uniquement d'une tour édifiée sur le fossé défensif Saint-Philibert qui marque l'entrée de la presqu'île.

Xe siècle

20 février 930: Avec l'abbaye de Jumièges, l'église de Yainville est restituée aux religieux par Guillaume Longue Épée. La restauration est entreprise. Yainville relèvera de la baronnerie de Jumièges comme les deux autres paroisses de la presqu'île.

942: l'assassinat du duc de Normandie compromet les travaux de restauration de l'église.

XIe siècle

1027: Une charte de Richard II, duc de Normandie, confirme que le village d'Ewenvillam est possession de l'abbaye de Jumièges.

1030: L'église Saint-André aboutit à sa physionomie actuelle. On s'est inspiré de l'architecture de la grande tour de ND-de-Jumièges. C'est l'époque où de nombreuses églises normandes sont restaurées au profit d'expéditions, notamment dans le sud de l'Italie.

1079 : Lhistorien Dom Toussaint Duplessis situe à cette date le don à l'abbaye de Jumièges par Fouques de Mellonis-Villa les territoires d'Heurteauville et de Yainville. Ce qui semble, comme nous l'avons vu, bien tardif.

XIIe siècle

1147: Une bulle du pape Eugène III mentionne que les religieux de l'abbaye possèdent l'église de Saint-André de Yainville.

XIVe siècle

1305 : différend entre les religieux de Jumièges et Guillaume Des Mares au sujet du champart. 9 H 1799

1369: Le bailli de Rouen effectue une visite en la paroisse du Trait-Yainville et dresse un rapport. (Bibliothèque nationale, 2 6008 N° 657).

1396, 29 septembre. Compte des œuvres de charpenterie, maçonnerie et couverture faites à la maison de la cohue du roi à Yainville. (Ms. fr. 26028, m 2390)

XVe siècle

1462 - 1472 : Simon Bouffart est curé d'Yainville et du Trait, aidé d'un chapelain nommé Guillaume Cannevote. 

1485: Le vicaire général de l'archevêché de Rouen visite la paroisse et confirme le droit exclusif des religieux à percevoir la dîme.

XVIe siècle

1512: Jusque là, l'église Saint-André, dépendant de l'abbé de Jumièges, baron de Duclair, faisait office d'église paroissiale alors que Le Trait relevait des seigneurs du même nom. Ce qui donna lieu à de nombreuses altercations. C'est à Yainville que sont donnés les sacrements et célébrés les grandes fêtes de Pâques, Noël, Toussaint et Saint-André. Un chapelain disait cependant la messe le dimanche au Trait. En 1512, la chapelle Saint-Nicolas du Trait devient église paroissiale. Par concession de l'abbé de Jumièges, elle reçoit des fonts baptismaux et s'entoure d'un cimetière. Le Trait devient ainsi paroisse indépendante, et Yainville son annexe. C'est au XVIe siècle que le mur nord de l'église Saint André fut percé d'une fenêtre ainsi que le côté sud de la tour.

1563 : ouverture du plus vieux registre d'état-civil d'Yainville.

1571 : Le 20 janvier, un écuyer de Bliquetuit, Estienne Delahaye, épouse dans l'église d'Yainville Marguerite de Gaillarbois. Elle était veuve de Jehan Delahaye. Le 19 novembre, c'est un écuyer du Trait, veuf, Christophe de Hameaux, qui convole avec une Jacqueline dont le nom n'est pas précisé. Elle était veuve de François Lemonnier.

9 juillet 1580: Jean du Fay, écuyer, seigneur du Taillis, épouse en l'église de Yainville Madeleine Jubert, originaire de Rouen. Jean a déjà perdu son père, conseiller au Parlement. C'est son arrière-grand-père, Richard, qui, en 1532, s'était porté acquéreur du château dans la plaine de Duclair, juste à la limite de Yainville. Seigneurs du Trait, Jean et Madeleine auront dix enfants, dont un André et une Madeleine... Sur ce plan de 1659, on a tracé la frontière entre la seigneurie du Trait et le domaine des moines. En face du château, on remarque une allée d'ormes. A partir de la route, un chemin de traverse conduit aussi vers Yainville.

 

XVIIe siècle

 

1647: Michel Delarue, vicaire perpétuel de Saint-André d'Yainville et de la chapelle du Trait jouit seul et pleinement des dîmes de sa paroisse.

1649: Les moines intentent un procès à Delarue. Le Parlement de Rouen les suit et Delarue de percevra plus que la portion congrue, soit 200 livres par an.

1657: Delavigne, arpenteur du roi, dresse un rapport sur les forêts du cru. Au XVIIe siècle, un chemin de halage allant de Rouen au Trait est attesté.

25 juin 1683. Venu de Falaise, un ouragan s’engouffre dans la vallée d’Yainville et va frapper Rouen en dévastant les forêts sur son passage.

1683, — 23 juin. Orage violent à Rouen. La grêle d'une grosseur extraordinaire brisa les couvertures des édifices et détruisit même quelques maisons. Le clocher de Saint-André tomba sur la nef; la flèche de Saint-Michel fut emportée de l'autre côté de la rue et abattit une maison.

L'ouragan s'était élevé sur les 4 heures du soir, avait commencé vers Falaise, puis s'avançant du côté de Lisieux avait passé par Montfort, Croisset, Quevilly, la vallée d'Yainville.

1684: Pierre de la Vigne dresse la "carte contenant toutes les figures des pièces d'héritages tant du domaine fieffé que non fieffé de la paroisse d'Yenville dépendant de la baronnie de Jumièges appartenant à Messieurs les religieux prieur et couvent de l'abbaye royalle de Sainct-Pierre de Jumièges..." On compte une quarantaine de constructions.

 

XVIIIe siècle

Le registre de la fabrique d' Yainville nous fait traverser le siècle en étant posté dans le clocher de l'église.

26 septembre 1700: Les paroissiens de Saint-André de Yainville s'assemblent au son de la cloche après la messe pour élire les collecteurs de l'année 1701. Celui de l'année présente et ses consorts désignent Me Nicolas Lefort pour maître collecteur et porte bourse et pour second Jean Yet, père, pour troisième François Brunet. Présent, Duval, prêtre de la paroisse assiste aux signatures.

 23 mars 1717: A 9h du soir, une maison prend feu. On retrouvera les restes calcinés de Barbe Vivien, veuve Dubois, 60 ans, Antoine Marette, 16 ans, Jeanne, 8 ans, Jean, 6 ans, Magdeleine, 3 ans. Ils furent inhumés le 25 mars.

1738: Peuplée de 120 familles, la paroisse du Trait-Yainville s'étend sur 500 hectares. 300 sur le Trait, 200 sur Yainville. Pouchin, le prêtre de la paroisse, est accusé de commettre des erreurs dans son ministère. Il argue de son inexpérience.

1740: L'historien Duplessis, dans sa Description de la Haute-Normandie, parle de la cure de Le Trait-Yainville, précisant que les deux villages sont alors séparés sur le plan civil. Jusqu'au XIXe siècle, les enfants d'Yainville iront faire leur première communion au Trait.

1772 : la commune compte 50 feux.

1785: "Grande sécheresse excepté le peu de neige de janvier et février, il n'est tombé d'eau que la nuit du 28 au 29 may."

Dimanche 29 mars 1789: rédaction du cahier de doléances en vue des états généraux. En voici le texte:

Cahier de plainte, doléance et remontrance arrêté par le tiers-état de la paroisse de Yainville. 

1793 : 204 habitants. A l’époque révolutionnaire, Yainville est ainsi décrite. Les terres sont sablonneuses, marécageuses près de la Seine et l’on compte peu de prairies. Les habitants sont journaliers, carriers, fileurs, bûcherons dans la forêt de Brotonne et pauvres pour la plupart.




Différents articles traitent de la période révolutionnaire. On les retrouve dans le sommaire de la page Yainville. On peut aborder le XIXe siècle avec Napoléon en cliquant sur la clef qui suit :
Suit la Restauration, la Monarchie de Juillet, le Second  Empire, la IIIe République...
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