Par Laurent Quevilly
Pierre Delphin Chéron et Pascaline Mauger, mes bisaïeux, furent des figures des passages de la Seine, entre Jumièges et Guerbaville. Leurs enfants naquirent ainsi au fil de l'eau. Descendance...

Gaston Poullard, Delphine Chéron, c'est ce couple qui, en 1919, accueillit à Saint-Martin-de-Bosherville la fratrie des Mainberte qui venaient de perdre leurs parents au café du Passage. Nous évoquons cette belle histoire dans le chapitre des Carrières Silvestre suivi des Mainberte à Boscherville.
Les Poulard n'eurent qu'un seul enfant, Max, mort à 19 ans, en 1923, de la fièvre typhoïde. Un de ses cousins, Max Mainberte, héritera de son prénom en 1927.

Georgette épousa Georges Lemaréchal, un charrretier établi à Yainville et né en 1870 au Mesnil. Quand il se maria à Yainville, en 1892, son père, veuf, était dit douanier à la retraite à Honfleur. Les témoins de son mariage: Narcisse Lemaréchal, 71 ans, garde-champêtre demeurant à Heurteauville et oncle du futur. Ferdinand Lemaréchal, 28 ans, cultivateur demeurant à Heurteauville, frère du futur. Sosthène Chéron, 41 ans, douanier demeurant à Mesnil-sous-Jumièges, oncle de la future. Gaston Poullard, 23 ans, charretier demeurant à Duclair, ami des futurs époux (vraisemblablement fiancé de Delphine Chéron).
Georges Lemaréchal fut cultivateur dans la ferme tenue plus tard à Yainville par les Berneval. En 1903 et 1913, il est localisé à Jumièges comme cultivateur, travailla pour la centrale électrique de Yainville puis chez Chausson dans la région parisienne. Il est mort à Yainville l'année de ma naissance, en 1951. C'est lui qui fut sans doute le témoin de la mort de mon arrière-grand-mère en 1928, Adelaïde Mauger, qui était sa belle-mère. Georgette est décédée en 1955.
Georges Lemaréchal portait le nom d'une antique famille de Jumièges qui occupait la charge héréditaire de maréchal de l'abbaye, autrement dit l'homme d'arme qui accompagnait l'abbé dans ses déplacements.

Cinq enfants forment la descendance de Georges Lemaréchal et Georgette Chéron :
a)
Georges Lemaréchal, 1893-1928, Il
était charretier à Jumièges dans la
ferme de ses
parents au moment de son conseil de révision. Sous la toise,
il
accuse 1,66 m. Il a les cheveux châtain, les yeux bleus
jaunâtres note le médecin militaire. Il a une
cicatrice
à l'arcade sourcillère droite. Mais la voit-on
tant ses
sourcils sont drus. Engagé volontaire le 26 octobre 1913
à Duclair, il arrive au 129e RI le 27.
Créé
à la Révolution, ce régiment est
caserné au
Havre.
Le 2 août 1914 débute pour lui sa campagne aux armées du Nord. 24 août : combats de Charleroi, 29 août : Guise. Puis première bataille de la Marne. Le 27 septembre 1914, il est nommé caporal.
En 1915, Georges est de l'offensive en Artois. "Le 5 juin a enlevé ses hommes à l'assaut avec une belle crânerie". Ainsi est-il cité le 25 à l'ordre de la division. Le 26, il est nommé sergent en recompense de sa bravoure. Mais le 15 octobre 1915, il est blessé par balles et perd son index à Neuville-Saint-Vaast. On le rapatrie vers l'intérieur.
Le sergent Lemaréchal repart au combat du 11 juillet au 19 décembre 1916 à Verdun puis du 17 janvier au 20 avril 1917 en Lorraine... Bref, il alterne les périodes aux armées avec celles à l'intérieur.
Georges était dans une unité combattante lorsque, bénéficiant d'une permission, il se marie le 21 février 1918 à Paris.
Georges Lemaréchal a rencontré en effet une femme de 12 ans son aînée, originaire du Cher, gérante au 15, avenue de Messine. Dans cet immeuble luxueux vit notamment Désiré-Lucien Le Thierry d'Ennequin, entouré d'objets d'art qu'il léguera à quelques musées. Marie Augustine Bouret est la fille d'un cultivateur illettré. Les deux parents de la mariée sont déjà décédés lorsqu'elle prend Georges pour époux. Aigustine est de longue date dans la capitale. En 1911, elle passe une curieuse annonce dans l'édition européenne du New York Herald.

Comment diable notre Poilu a-t-il fait connaissance avec cette Parisienne d'adoption. En rendant visite à sa sœur Denise, déjà dans la capitale ? Elle à à peine 20 ans et ne figure pas sur la photo. Augustine est-elle sa marraine de guerre ? La date du mariage est attestée par le maire d'Heurteauville, Charles Guérin. Celui-ci fut célébré par Gaston Drucker, adjoint au maire du 8e. Curieusement, Georges est dit cultivateur et résidant à Jumièges. Comme ses parents qui ont donné leur consentement par acte authentique. Or, Georges est toujours sous les drapeaux depuis son engagement volontaire en 1913. Il se marie même en uniforme du 129e RI avec ses deux décorations bien en vue. Car les seules photos que nous possédons de lui ont été sans doute prises le jour de son mariage. Les témoins sont Rose Grapin, 45 ans, cuisinière, 6, square de Messine, Marcel Coutant, 25 ans, employé de bureau, Croix de guerre, 53, rue de la Boëtie, Marthe Jacquet, épouse Despains, 40 ans, crêmière, 1, rue Mollien et Constantin Taulin, 32 ans, employé de bureau, 3, rue du Département.

Puis George repart au front. Le 13 juin 1918, il est blessé à la Ferme des logis. Fracture du radius gauche
Le 16 avril 1919, il est nommé adjudant. Le même mois, il pose pour une photo de groupe, entouré d'élèves caporaux, "souvenir de Landau", avril 1919." Il est donc en Allemagne. Georges porte un révolver à la taille.

Croix de guerre, médaille interalliée de la Victoire, il se retire après la Grande guerre au domicile de son épouse à Paris, 15 avenue de Messines, 8e arrondissement.
Quelle fut alors son activité ? Douteuse, manifestement. Bien qu'il ait été rayé par la suite, un premier jugement figure dans son dossier militaire. Il a été prononcé par la 10e chambre du tribunal correctionnel de la Seine le 4 mai 1921. 300 F d'amende pour spéculation illicite sur le coke. Délit très à la mode...
Puis il est condamné pour escroquerie par le tribunal correctionnel de Rouen le 15 septembre 1921. Au terme d'un jugement contradictoire, il écope de trois mois de prison avec sursis et 500 F d'amende. L'audience du 15 septembre fut présidée par M. Chalvon-Demersay et fit l'objet d'un compte-rendu dans le Journal de Rouen. Il y eut deux affaires de vol, un abus de confiance, trois plaintes pour coups et enfin la séance s'acheva sur une affaire d'escroquerie qui pourrait donc impliquer notre cousin. En voici l'article :
"Ils", ce sont des alternateurs électriques, des rails, des bougies d'allumages et autres appareils d'électricité, des papiers d'affaires, qu'un pseudo-ingénieur se voyait réclamer hier par cinq plaignants qui lui avaient remis des sommes fort importantes pour l'achat de ces marchandises.
A l'audience, notre ingénieur, qui ne craignait pas de dire que les plaignants étaient des menteurs, expliqua que le tout était resté en Allemagne et n'en pouvait sortir, par suite de prohibitions du gouvernement allemand.
La véracité de ses dires n'ayant pas été vérifiée à l'instruction, un supplément d'enquête a été ordonné par le tribunal, mais la liberté provisoire que le défenseur de l'inculpé demandait pour son client a été refusée.
Le 23 octobre 1922, alors qu'il est de nouveau localisé par l'armée à Paris, au 15 de l'avenue de Messine, une pension de 15% lui fut octroyée pour la perte de son index et les reliquats d'une intoxication au gaz. Mais l'adjudant de réserve fut cassé de son grade en 1924 et ramené au rang de soldat de 2e classe.
Au recensement de 1926, Georges et son épouse ne figurent plus au 15 de l'avenue de Mesinne.
Georges Lemaréchal meurt à Rouen en 1928, âgé de 34 ans. On ne lui connaît pas de descendance.
Sa veuve ne se remariera pas. Selon la tradition familiale, Augustine Lemaréchal vécut de ses charmes tandis que sa belle-sœur, Denise, connaissait une spectaculaire ascension place Vendôme, au-dessus de chez Boucheron. Elle mourut à Yvry-sur-Seine le 21 janvier 1971.
Le 2 août 1914 débute pour lui sa campagne aux armées du Nord. 24 août : combats de Charleroi, 29 août : Guise. Puis première bataille de la Marne. Le 27 septembre 1914, il est nommé caporal.
En 1915, Georges est de l'offensive en Artois. "Le 5 juin a enlevé ses hommes à l'assaut avec une belle crânerie". Ainsi est-il cité le 25 à l'ordre de la division. Le 26, il est nommé sergent en recompense de sa bravoure. Mais le 15 octobre 1915, il est blessé par balles et perd son index à Neuville-Saint-Vaast. On le rapatrie vers l'intérieur.
Le sergent Lemaréchal repart au combat du 11 juillet au 19 décembre 1916 à Verdun puis du 17 janvier au 20 avril 1917 en Lorraine... Bref, il alterne les périodes aux armées avec celles à l'intérieur.
Georges était dans une unité combattante lorsque, bénéficiant d'une permission, il se marie le 21 février 1918 à Paris.
Georges Lemaréchal a rencontré en effet une femme de 12 ans son aînée, originaire du Cher, gérante au 15, avenue de Messine. Dans cet immeuble luxueux vit notamment Désiré-Lucien Le Thierry d'Ennequin, entouré d'objets d'art qu'il léguera à quelques musées. Marie Augustine Bouret est la fille d'un cultivateur illettré. Les deux parents de la mariée sont déjà décédés lorsqu'elle prend Georges pour époux. Aigustine est de longue date dans la capitale. En 1911, elle passe une curieuse annonce dans l'édition européenne du New York Herald.

Comment diable notre Poilu a-t-il fait connaissance avec cette Parisienne d'adoption. En rendant visite à sa sœur Denise, déjà dans la capitale ? Elle à à peine 20 ans et ne figure pas sur la photo. Augustine est-elle sa marraine de guerre ? La date du mariage est attestée par le maire d'Heurteauville, Charles Guérin. Celui-ci fut célébré par Gaston Drucker, adjoint au maire du 8e. Curieusement, Georges est dit cultivateur et résidant à Jumièges. Comme ses parents qui ont donné leur consentement par acte authentique. Or, Georges est toujours sous les drapeaux depuis son engagement volontaire en 1913. Il se marie même en uniforme du 129e RI avec ses deux décorations bien en vue. Car les seules photos que nous possédons de lui ont été sans doute prises le jour de son mariage. Les témoins sont Rose Grapin, 45 ans, cuisinière, 6, square de Messine, Marcel Coutant, 25 ans, employé de bureau, Croix de guerre, 53, rue de la Boëtie, Marthe Jacquet, épouse Despains, 40 ans, crêmière, 1, rue Mollien et Constantin Taulin, 32 ans, employé de bureau, 3, rue du Département.

Puis George repart au front. Le 13 juin 1918, il est blessé à la Ferme des logis. Fracture du radius gauche
Le 16 avril 1919, il est nommé adjudant. Le même mois, il pose pour une photo de groupe, entouré d'élèves caporaux, "souvenir de Landau", avril 1919." Il est donc en Allemagne. Georges porte un révolver à la taille.

Croix de guerre, médaille interalliée de la Victoire, il se retire après la Grande guerre au domicile de son épouse à Paris, 15 avenue de Messines, 8e arrondissement.
Quelle fut alors son activité ? Douteuse, manifestement. Bien qu'il ait été rayé par la suite, un premier jugement figure dans son dossier militaire. Il a été prononcé par la 10e chambre du tribunal correctionnel de la Seine le 4 mai 1921. 300 F d'amende pour spéculation illicite sur le coke. Délit très à la mode...
Puis il est condamné pour escroquerie par le tribunal correctionnel de Rouen le 15 septembre 1921. Au terme d'un jugement contradictoire, il écope de trois mois de prison avec sursis et 500 F d'amende. L'audience du 15 septembre fut présidée par M. Chalvon-Demersay et fit l'objet d'un compte-rendu dans le Journal de Rouen. Il y eut deux affaires de vol, un abus de confiance, trois plaintes pour coups et enfin la séance s'acheva sur une affaire d'escroquerie qui pourrait donc impliquer notre cousin. En voici l'article :
ILS SONT EN ALLEMAGNE !
"Ils", ce sont des alternateurs électriques, des rails, des bougies d'allumages et autres appareils d'électricité, des papiers d'affaires, qu'un pseudo-ingénieur se voyait réclamer hier par cinq plaignants qui lui avaient remis des sommes fort importantes pour l'achat de ces marchandises.
A l'audience, notre ingénieur, qui ne craignait pas de dire que les plaignants étaient des menteurs, expliqua que le tout était resté en Allemagne et n'en pouvait sortir, par suite de prohibitions du gouvernement allemand.
La véracité de ses dires n'ayant pas été vérifiée à l'instruction, un supplément d'enquête a été ordonné par le tribunal, mais la liberté provisoire que le défenseur de l'inculpé demandait pour son client a été refusée.
Le 23 octobre 1922, alors qu'il est de nouveau localisé par l'armée à Paris, au 15 de l'avenue de Messine, une pension de 15% lui fut octroyée pour la perte de son index et les reliquats d'une intoxication au gaz. Mais l'adjudant de réserve fut cassé de son grade en 1924 et ramené au rang de soldat de 2e classe.
Au recensement de 1926, Georges et son épouse ne figurent plus au 15 de l'avenue de Mesinne.
Georges Lemaréchal meurt à Rouen en 1928, âgé de 34 ans. On ne lui connaît pas de descendance.
Sa veuve ne se remariera pas. Selon la tradition familiale, Augustine Lemaréchal vécut de ses charmes tandis que sa belle-sœur, Denise, connaissait une spectaculaire ascension place Vendôme, au-dessus de chez Boucheron. Elle mourut à Yvry-sur-Seine le 21 janvier 1971.

Mort à 50 ans à Jumièges, il aurait, m'a-t-on dit, fini ses jours en 1946 à la ferme des îles, cette magnifique maison de maître, près de la Seine, au regard de l'abbaye. J'en doute mais laissez-moi rêver. Époux de Marie Barbey (1894-1961) Charles eut un fils, Jacques, marié à une fille Choulan. Il est dit aussi que ce fut plutpot lui qui exploita la ferme des îles mais, aurait prétendu Jacqueline Macchi, il aurait "mangé la grenouille". Il mourut en tout cas à Nantes le 5 février 1997. Dont descendance, je suppose...








Née à Guerbaville, elle décéda peu de temps après son mari, Emile Mainberte, durant la guerre de 14, à Yainville, soit d'une tuberculose transmise par son époux, soit d'une grargraine après une plaie mal soignée en allant ramasser du "manger à lapin". Elle a tenu le café du Passage de 1909 à 1918. Se enfants se trouvant orphelins furent recueillis par des tantes à Saint-Martin-de-Boscherville puis émigrèrent à Paris. Seule ma mère revint au pays.





b) Louis, 1917-1959, né
et
enterré à Yainville, employé SNCF
à Montauban.

Martine Chéron, 1880-1907. Native d'Heurteauville, elle épousa Einar Topp à Duclair le 15 mai 1907, un ingénieur métallurgiste norvégien venu travailler à la clouterie Mustad.
En 1881, le marché français se ferme aux gros exportateurs norvégiens de clous de cheval. Alors, l'entreprise Ole Mustad, fondée en 1832, vient s'implanter à Duclair. L'agriculture libère une main-d'œuvre docile, le train passe ici, il y la Seine, l'Austreberthe... A partir de 1891, Clarin Mustad, un des fils du fondateur, monte l'usine. Mathias Topp, ingénieur, inventeur qui fait la fortune de la famille Mustad, est à ses côtés.

Fils du bon génie des Mustad, Einar Topp et Martine sont de la dizaine de couples de nationalité mixte qui se forment. Mariage insolite selon le rite luthérien, sans la consécration du curé de Duclair. Le mariage eut lieu en mai 1907.

8) Marie Chéron, 1884-1966, Les témoins de sa naissance furent les mêmes que ceux de sa sœur Martine, Cuffel et Pestel. Elle est née au hameau du Passage du Trait où son père est batelier. Mais il armait alors un bateau à la pêche fraîche. Elle alla donc au chevet de sa sœur Martine, en Norvège, et eut un enfant de son beau-frère, Einar Topp. Marie vécut un temps à Saint-Martin-de-Boscherville où elle était couturière; Puis elle reprit le café du Passage, à Yainville, après la mort de ma grand-mère. Elle possèdera aussi le café de l'église d'Yainville. Elle a fini ses jours dans la maison située à l'arrière de l'établissement.

Epouse Raoul Chandelier, 1881-1969, facteur en bois d'abord chez Bardel. Ils habitaient la dernière maison sur la gauche avant la montée de Saint-Martin-de-Bosherville vers Canteleu. Il fut capitaine des pompiers de Saint-Martin. Cette compagnie composée de gros effectifs existait depuis les nombreux incendies qui, de 1871 à 1874 avaient dévasté plusieurs habitations. Deux fills : Eva et Simone, morte jeune. Toutes deux montèrent à Paris avec leurs cousines Mainberte.
Nous-nous rendions épisodiquement chez les Chandelier. Raoul impressionnait les enfants. Il avait le teint jaune. Hépatite. C'était, comme tous les personnages que nous venons d'évoquer, un être d'une grande gentillesse.