Notre langue
Charmeuse elle se raconte
Et d'une main impatiente
En dessine les mots.
Jalouse elle t'appelle
Veut te parler de nous
Te donner rendez-vous.
Volubile, elle tchatche
Au café, dans les rues
S'Oranise, s'Hispanise.
Adolescente, elle rit,
Légère, insolente,
S'interpelle en scoot, en mobs.
Alarmée, elle gronde,
Aux carrefours, dans les cours,
Elle affole, elle bouscule.
Le malheur est chez nous,
Il tam-tam aux fenêtres
Il est là, il est fou.
Elle hurle de mille voix,
Veut partager la peine,
Te dit réveille-toi.
Pied-noir tu es chez toi,
Ne pars pas, reste là.
Puis, lasse elle s'épuise,
Et vaincue elle se tait.
Aphone à jamais,
Elle n'ose que murmurer.
Puis cherche à rassembler,
Pour un départ forcé,
Ses enfants égarés.
Yvette
PASCUAL.
Nos jeunes filles | Notre langue | L'oubli | 5 juillet 1962
BONUS
Petits moments de la Cueva del agua.
J’y
allais
toute petite. L’agua, la mer, d’abord pour la
sentir pour
la regarder, du haut du parapet où je me perchais. Je
n’y
arrivais pas toute seule, mais il y avait
toujours un grand pour m’aider ou je m’aidais
d’un
gros caillou. Les jambes de l’autre côté
du mur, les
yeux au loin, la vue était magnifique. Le soleil faisait
briller
la surface de l’eau et j’entendais son chant. Cette
immensité qui bruissait.
Le soleil tapait et il y avait aussi l’odeur. Le sel qui remontait porté par l’air marin. Sur ce bord de falaise, les pierres, la terre blonde et sèche, les buissons d’épineux qui s’accrochaient comme ils pouvaient sur la roche tombante. Le long du mur aussi, côté falaise il y avait toute une végétation qui y courait, on pouvait croquer ou goûter ces herbes elles avaient le goût de sel ou de sucre.
Plus grande, je devais avoir 10 ans, j’y allais sur le muret, ou sur les terrains le long de la falaise, c’était assez sauvage, je le faisais tout le temps, nous habitions à quelques mètres, dès que je le pouvais mais jamais seule, il y a avait toujours un gamin ou deux comme moi. Nous étions vraiment attirés vers le bord de cette falaise. On s’y promenait, on allait au téléphérique, j'avais peur de ces longs câbles entourant la grande roue et qui plongeaient jusqu’à la mer. J’ai encore cette impression de vertige. Je ne crois pas l’avoir vu fonctionner cette mécanique si grande, mais j’ai vu les garçons y jouer, c’était dangereux.
Il y avait le sentier qui descendait jusqu’en bas, chemin aride, pentu, sec ou assez glissant après la pluie si on ne faisait pas attention.
Et puis petite jeune fille, j’ai continué à aller sur ce bord de mer que l’on a toujours appelé la Cueva del agua.
D’où que l’on se place, d’où que l’on admire cette superbe méditerranée, elle portait ce nom. Mais cette fois ce n’était plus au bout de la rue Arloing, notre quartier, mais de la rue Charcot, de chez ma grand-mère qui y a toujours vécu, même après le décès du grand père.
Je partais de l’EGA pour aller voir la mémé.
Et, là j’étais libre, je descendais par le sentier pierreux jusqu’au bord de l’eau. Quelquefois il y avait ma sœur, quand elle ne travaillait pas. On y restait un bon moment, sans peur, on se trouvait un rocher plat, pour s’y asseoir en écoutant l’eau et se chauffant au soleil, le nez plein d’odeurs subtiles.
On trempait nos jambes ou les pieds dans cette eau si fraîche et vivifiante.
On regardait les pêcheurs, souvent autour du condouto, le rejet des égouts, quelques-uns y plongeaient leurs lignes car c’est là qu'ils prenaient les meilleurs poissons. Et puis il y avait les cabanons, petits coins de paradis, on sentait des odeurs qui remontaient du canoun.
Et puis les bateaux, il y avait une belle activité dans le port et sur l’eau.
On allait aussi pour des rendez-vous amoureux, mais si peu. Les filles, nous faisions tellement attention. Pour les frères et leurs copains, ils savaient qu’ils ne devaient pas « manquer » à la sœur. Les sœurs étaient intouchables et respectées.
Donc les flirts, à moins de rendez vous très secrets, étaient sous haute surveillance.
Mais j’ai flirté, un peu sur ce muret face à la grande bleue. J’en un souvenir très précis de moments tendres heureux et innocents dans ce coin de paradis.
Et enfin en dévalant le sentier comme nous le faisions, j’avais été emportée trop vite et alors l’accident la chute et une foulure à la cheville très douloureuse que ma pauvre grand-mère avait soignée comme elle pouvait, entourant ma cheville d’une bande.
J’avais dû aller à la clinique Juan en face de l’EGA, tellement j'avais eu mal, ma cheville garde encore trace de cette foulure.
Il nous est resté une emprise de ces moments, Liliane a toujours voulu retrouver la mer mais surtout les rochers pour s’y asseoir et laisser ses pieds effleurer l’eau. Elle avait toujours eu cette envie de rochers. Quant à moi, j’aurais donné beaucoup pour rester près de la mer.
On a eu le bonheur de vivre ces moments magnifiques, simples et magiques. Ces images là sont un trésor que je garde en moi notre Cueva del agua.
Le soleil tapait et il y avait aussi l’odeur. Le sel qui remontait porté par l’air marin. Sur ce bord de falaise, les pierres, la terre blonde et sèche, les buissons d’épineux qui s’accrochaient comme ils pouvaient sur la roche tombante. Le long du mur aussi, côté falaise il y avait toute une végétation qui y courait, on pouvait croquer ou goûter ces herbes elles avaient le goût de sel ou de sucre.
Plus grande, je devais avoir 10 ans, j’y allais sur le muret, ou sur les terrains le long de la falaise, c’était assez sauvage, je le faisais tout le temps, nous habitions à quelques mètres, dès que je le pouvais mais jamais seule, il y a avait toujours un gamin ou deux comme moi. Nous étions vraiment attirés vers le bord de cette falaise. On s’y promenait, on allait au téléphérique, j'avais peur de ces longs câbles entourant la grande roue et qui plongeaient jusqu’à la mer. J’ai encore cette impression de vertige. Je ne crois pas l’avoir vu fonctionner cette mécanique si grande, mais j’ai vu les garçons y jouer, c’était dangereux.
Il y avait le sentier qui descendait jusqu’en bas, chemin aride, pentu, sec ou assez glissant après la pluie si on ne faisait pas attention.
Et puis petite jeune fille, j’ai continué à aller sur ce bord de mer que l’on a toujours appelé la Cueva del agua.
D’où que l’on se place, d’où que l’on admire cette superbe méditerranée, elle portait ce nom. Mais cette fois ce n’était plus au bout de la rue Arloing, notre quartier, mais de la rue Charcot, de chez ma grand-mère qui y a toujours vécu, même après le décès du grand père.
Je partais de l’EGA pour aller voir la mémé.
Et, là j’étais libre, je descendais par le sentier pierreux jusqu’au bord de l’eau. Quelquefois il y avait ma sœur, quand elle ne travaillait pas. On y restait un bon moment, sans peur, on se trouvait un rocher plat, pour s’y asseoir en écoutant l’eau et se chauffant au soleil, le nez plein d’odeurs subtiles.
On trempait nos jambes ou les pieds dans cette eau si fraîche et vivifiante.
On regardait les pêcheurs, souvent autour du condouto, le rejet des égouts, quelques-uns y plongeaient leurs lignes car c’est là qu'ils prenaient les meilleurs poissons. Et puis il y avait les cabanons, petits coins de paradis, on sentait des odeurs qui remontaient du canoun.
Et puis les bateaux, il y avait une belle activité dans le port et sur l’eau.
On allait aussi pour des rendez-vous amoureux, mais si peu. Les filles, nous faisions tellement attention. Pour les frères et leurs copains, ils savaient qu’ils ne devaient pas « manquer » à la sœur. Les sœurs étaient intouchables et respectées.
Donc les flirts, à moins de rendez vous très secrets, étaient sous haute surveillance.
Mais j’ai flirté, un peu sur ce muret face à la grande bleue. J’en un souvenir très précis de moments tendres heureux et innocents dans ce coin de paradis.
Et enfin en dévalant le sentier comme nous le faisions, j’avais été emportée trop vite et alors l’accident la chute et une foulure à la cheville très douloureuse que ma pauvre grand-mère avait soignée comme elle pouvait, entourant ma cheville d’une bande.
J’avais dû aller à la clinique Juan en face de l’EGA, tellement j'avais eu mal, ma cheville garde encore trace de cette foulure.
Il nous est resté une emprise de ces moments, Liliane a toujours voulu retrouver la mer mais surtout les rochers pour s’y asseoir et laisser ses pieds effleurer l’eau. Elle avait toujours eu cette envie de rochers. Quant à moi, j’aurais donné beaucoup pour rester près de la mer.
On a eu le bonheur de vivre ces moments magnifiques, simples et magiques. Ces images là sont un trésor que je garde en moi notre Cueva del agua.
Yvette
PASCUAL.
2006
2006