Par Laurent Quevilly-Mainberte


Depuis la Sainte-Madeleine de 1891 jusqu'à la drôle de guerre, quelles furent les fêtes à Yainville ? Second épisode de notre série...



Dimanche 25 juillet 1897, l'assemblée de La Madeleine se tient chez Ferdinand Lemaréchal, place de l'Église, avec des jeux divers et un bal gratuit.
Fils de douanier, Lemaréchal est l'époux d'Adolphine Testu, native d'Anneville. Quand il s'est marié, quelques années plus tôt à Yainville, il était encore domestique dans une ferme de la Moulière, à Heurteauville. Depuis, toujours à Yainville, son frère Georges a épousé une Chéron. Nous voilà donc en famille. Ferdinand est alors venu reprendre le café de l'Église. On le voit ici, avec un faux air de Jean Carmet, en compagnie d'une solide collaboratrice..

Sous Patrice Costé, successeur d'Émile Silvestre à la Mairie, la municipalité se limite toujours aux fêtes patriotiques. C'est que la commune est pauvre et les carrières subissent de plein fouet la crise liée à l'arrêt des travaux de la Basse-Seine.

Alors, une délibération sensiblement identique revient chaque année à l'approche du 14 Juillet : " Considérant qu'il est désirable que dans toutes les familles on puisse apprendre à aimer et à chérir cette date mémorable, décide que les 20 F inscrits au budget sous la rubrique fêtes publiques seront employés à faire une distribution de pain et de viande aux indigents. Considérant d'autre part :
Au Mesnil...

Août 1901. A la Saint-Philibert du Mesnil des manèges de chevaux de bois sont attestés place de la mairie. Ce n'est sans doute pas une première dans nos contrées mais les carrousels mécaniques ne sont apparus que 40 ans plus tôt.

1°) que le désir du conseil serait de donner à la fête du 14 Juillet le plus d'éclat possible
,
2°) que les ressources communales font absolument défaut,

Demande à M. le Préfet de bien vouloir accorder un secours qui permettra de célébrer le 14 Juillet avec la solennité que comporte la fête d'un grand peuple..."


La fête chez Cuffel



1903, Ferdinand Lemaréchal est parti tenir un estaminet rue des Moulins à Duclair. Au café de l'Église, Aristide Cuffel, son successeur, organise la Sainte-Madeleine le dimanche 26 juillet. 4 h : grand bal champêtre, à la chute du jour, fête vénitienne, à 10 h, grand feu d'artifice.
Cuffel est né à Jumièges et il a épousé Jeanne Laffont, originaire de Melles, Haute-Garonne. Elle est mercière et mère de trois enfants. Dans la maison, l'aîné est qualifié d'employé de commerce quand il se présente au conseil de révision. Le couple emploie aussi un ouvrier bourrelier.

Et voici la Sainte-Croix !

On avait la Saint-André, la Sainte-Madeleine, et voilà que l'on fête aussi la Sainte-Croix à Yainville. Et ça se passe le 13 septembre, chez Arthur Bénard, un natif de Lillebonne qui tient le relais au bas de la côté Béchère. Le programme ? courses vélocipédiques cantonales, à 3h, le soir. Bal à la chute du jour suivi d'une séance de phonographe. Moderne !...

1904, sous Athanase Leroy, nouveau maire et marchand de fruits aux Fontaines, il fut organisé le 19 juin une fête de l'Enseignement à l'occasion du centenaire de la Ligue. 5 F allèrent à une collation servie aux élèves. Cette fête fut marquée dans un contexte déplorable. Instituteur et secrétaire de mairie, Lucas Petit venait de se faire prendre la main dans le pot de confiture. Depuis son arrivée, voici deux ans, il avait détourné 1.200 F de la caisse de Secours mutuel.

Le dimanche 14 juillet, Cuffel organise la Sainte-Madeleine près de l'église. Bal à 4 heures, fête vénitienne, grand feu d'artifice. Cuffel soigne sa publicité en signalant qu'il possède un garage sécurisé pour bicyclettes.


1905 : bagarre générale !


Cuffel récidive le 23 juillet 1905. Mais là, tout dégénère. Dans la soirée, un Yainvillais fait une juste observation à Levavasseur, de Duclair. Celui-ci réplique par un violent coup de poing en pleine figure. Une bataille rangée ne tarde pas à s'organiser. Mêlée générale au cours de laquelle le sieur Lafosse, adjoint au maire et le garde-champêtre, Eustache Délogé, appelés sur les lieux, sont pris à partie. Délogé surtout qui, renversé, voit son uniforme réduit en charpie. Les gendarmes de Duclair viendront enquêter.

1906. Avec ses illuminations à l'acétylène à la tombée du jour, la Sainte-Madeleine fut en concurrence avec l'assemblée de Sainte-Marguerite qui se tenait dans la cour du sieur Louvet. L'année suivante, les deux fêtes auront la bonne intelligence de se décaler.

1907. La veuve Silvestre ayant rendu l'âme, son testament vint abonder le budget des livrets de prix dans les écoles et le ravitaillement des indigents le 14 Juillet.
Nous irons encore chez Cuffel fêter la Sainte-Madeleine en juillet. Mais tout près de chez nous, à Saint-Paul, ma modestie dut-elle en souffrir, on marque la Saint-Laurent dans les allées du château du Taillis appartenant alors à Lenepveu. Mlle Brunet s'occupe de tout ! Forcément, les Yainvillais viennent ici en voisins.

Le 15 septembre 1907, Cuffel et Bénard se mirent d'accord pour organiser ensemble la fête Sainte-Croix, près de l'église. A 14 h : jeux divers pour les enfants, 16 h : grand bal champêtre. Le soir : splendides illuminations à l'acétylène avec transformations de couleurs.

1908. Au café de l'Église, de nouveaux tenanciers ont succédé aux Cuffel : Henri Bruneau et ma grand-tante, Marguerite Mainberte, le couple organisa la Sainte-Madeleine le dimanche 19 juillet 1908. Il y eut des jeux divers à 17 h suivis d'un bal public. Le soir : illuminations et pièces d'artifice.

1909. Le 25 juillet, le programme est complété par une course de bicyclettes cantonale dès 14 h dotée de prix. A 17 h, jeux divers, bal public, le soir illuminations, feu d'artifice. Dès lors, la Sainte-Madeleine se poursuit sous cette forme.

1911, la commune versa son écot à l'organisation du Millénaire normand, 5 F. A la Sainte-Madeleine, il y a un prix par canton (Duclair, Caudebec, Pavilly) et une course pédestre. La fête est encore en concurrence avec la Sainte-Marguerite qui se tient là-bas chez la veuve Rabeil.

1912. Le dimanche 8 septembre, Bénard organisa encore la fête de la Sainte-Croix à Yainville. A 15 h, tout commençait comme de coutume par des jeux. Avec le concours de Paul Michel, de Duclair, avaient lieu ensuite des courses cyclistes. Une cantonale, une seconde Yainville-La Fontaine aller-retour. Bal, remise des prix et feu d'artifice clôturaient la journée. Mais c'est bientôt la guerre...

La fête tragique


On n'a aucun écho de réjouissances durant ces quatre longues années d'horreur. Le 11 novembre 1918, ce fut enfin l'Armistice et le cœur revint à la fête. Mais attention...

17 août 1919, 9h, huit habitants d'Anneville se font une joie de se rendre à la Saint-Philibert. A l'approche du Mesnil. une voie d'eau, la barque se remplit, les passagers paniquent, le rameur est inexpérimenté et l'embarcation chavire. Tout le monde se noie sous les yeux de Quesne, un paysan du cru. Les victimes :  M. et Mme Hulin et leur fils de 17 ans, leurs deux domestiques Lafosse, 50 ans, et Decaux, 16 ans, les époux Boutard et leur fils de 6 ans, jardiniers au château de Darcel
.

Yainville renoue avec la "fête"


Mais peut-on parler de fête quand, le dimanche 7 août 1921, on inaugure le monument aux morts d'Yainville. 14 h : un cortège se forme devant la mairie. Athanase Leroy, rebaptisé Anastase par Sacha Guitry, accueille Henri Denise, le conseiller général et restaurateur de Duclair. C'est lui qui présidera la journée. Nombre de maires du canton sont présents. Un élève de M. Samson ouvrira la marche en déployant le drapeau offert par Mme Raubiet, veuve de guerre. Voilées de blanc, les jeunes filles sont suivies par la fanfare de Duclair, les autorités, les démobilisés, les familles endeuillées.


Ses racines sont antérieures à 1876. La fanfare de Duclair sera dirigée par Louis Pellerin puis par son fils Marcel, comptable à la centrale d'Yainville...

Tendue de drapeaux, l'église s'avère trop petite. A l'entrée du chœur, on a reconstitué une tombe en sable, comme au front, ornée d'épis de blé et d'une croix avec cette inscription : A un soldat inconnu. Curé du Trait, l'abbé Quilan ouvre les vêpres, son confrère de Jumièges, l'abbé Groult, est à l'harmonium. Ils alterneront sermons patriotiques et intermèdes musicaux. Mon grand oncle Pierre Chéron et Louis Colignon procèdent à la quête en compagnie de l'abbé Groult. Les jeunes filles chantent "Ils sont tombés au champ d'honneur". Louis Colignon a été blessé à la tête et au pied par un éclat de bombe en juillet 1915. Mais il a fait campagne jusqu'au bout...
Dehors, voici la bénédiction du monument dû aux ciseaux de Ringault. Leroy procède à l'appel des morts et Louis Colignon lui répond. "Beyer Alexandre... Mort au champ d'honneur !... Bruneau Ernest !... Mort au champ d'honneur ! Bruneau Henri !... Mort au champ d'honneur..."
Les frères Bruneau ! tombés tous deux le même jour, sous le même uniforme, à quelques mètres l'un de l'autre. Henri Bruneau, l'organisateur des Sainte-Madeleine d'avant-guerre...
Leroy, Denise et Chéron y vont de leur discours, les enfants chantent et clament des poésies. La Marseillaise ponctue la cérémonie et le cortège se reforme pour le vin d'honneur en mairie.


A cette époque, la Sainte-Madeleine fut organisée au café Têtelin, sur le chemin de la gare. A l'approche de ses 100 ans, notre cousin Louis Acron se souvenait de la fête des années 20 : "A la retraite aux flambeaux, on partait du café. Chacun portait son falot et les grands avaient des pétards." Et certains atterrissaient par la fenêtre ouverte dans le chambre de Reniéville, le cafetier du bas de la côte Béchère. Qui s'empressait d'alerter la gendarmerie de Duclair.

Bien entendu, après guerre est apparut un nouveau jour férié au calendrier : le 11 Novembre. On le trouve mentionné en 1922 avec une distribution de gâteaux aux écoliers. Nombre d'entre eux avaient perdu leur père. Cette initiative coûta 15 F auxquels il fallut rajouter 5 F pour sonneries, le tout porté au chapitre des dépenses imprévues. Nous étions alors sous le mandat d'Émile Carpentier qui tenait la ferme de l'église.

Le 22 juillet 1923, la Sainte-Madeleine eut lieu au café Beyer. 15h : course cycliste, 16h: jeux divers, 17 h: mât de cocagne, 18 h grand bal public. M. Beyer tenait à disposition "toutes boissons et collations champêtres. "
La veille, samedi 21 juillet, eut lieu une retraite aux flambeaux. organisée par M. Tételin, du café de la Gare, avec le concours des tambours et clairons du Trait. Après quoi eut lieu un bal. Durant ces deux jours, on invita les habitants à pavoiser leur maison.



Flonflons au manoir de l'Église


Le dimanche 24 décembre 1922, Carpentier ouvrit sa ferme pour un concert organisé par la Caisse de secours de l'association des anciens combattants de Jumièges-Yainville et environs. Pierre Chéron  en était le secrétaire. On dressa une grande tente qui fut archi-comble. Il y avait là un sapin aux branches desquelles pendaient des jouets. Des lots de la tombola étaient également exposés. Ce fut le club artistique du Trait qui anima la soirée.


Société différente de la Fanfare, le Rappel est issu de la clique des sapeurs-pompiers de Duclair.

La cérémonie de 1924 est plus détaillée. On se rend en cortège de la mairie à l'église. Après messe : sonnerie de clairons par le Rappel de Duclair, discours, chants par les enfants des écoles. Puis on offre un vin d'honneur aux anciens combattants et à la société des trompettes. Cette fois, il en coûte 100 F. Ainsi Yainville aura eu la primeur d'une des premières sorties du Rappel. En effet, c'est le 8 mars de cette année-là que la clique des pompiers de Duclair animée par Henri Soudais a changé de nom...


La première commission


C'est le 30 juin 1925 que fut constituée pour la première fois une commission des fêtes au sein du conseil municipal. Ses quatre membres travaillaient tous à la centrale. 
Elle était composée de Augustin Bidaux, alors chauffeur à la Havraise, Pierre Chéron, magasinier,  Robert Gallais comptable et qui, malheureusement, connaîtra des problèmes de santé en 1930, enfin de Georges Riaux,, maçon et l'un des locataires de la maison Silvestre léguée à la commune.
Anciens Poilus, Augustin Bidaux et Pierre Chéron
deux des membres de la première commission

La première manifestation connue de cet aréopage fut l'organisation cette année-là d'une course cycliste "à l'occasion de la fête du 18 juillet". Ce qui tombait un dimanche

15 bouteilles de vin furent achetées pour le 11 Novembre 26 afin d'offrir un canon aux anciens combattants. Ce qui reste d'un calibre raisonnable.

Mais Pierre Chéron, parti s'établir à Saint-Paër, ne siégeait plus. La commission des fêtes s'en trouvait bancale et le maire pestait contre le déserteur. Le 16 juin 1928, on créa un Comité de la Sainte-Madeleine. Il fut composé de Jean Lévêque, Augustin Bidaux pour trésorier, Georges Riaux et Beyer pour membres.

Et la mairie s'implique


Le 27 juin 1930, voilà Jean Lévêque élu maire, secondé par Gustave Chéron, le passeur du bac et frère de Pierre. Originaire de Saint-Emilion et n'ayant rien renié des produits de son terroir d'origine, Lévêque a le sens de la fête. Il est encore créé un "Comité des fêtes" qui demeure en fait une commission municipale. Elle est présidée par Le Doze. Les membres : Chéron, Riaux et Lecanu.

Pour la première, fois, le 17 juin 1931, on voit le conseil adopter une telle délibération : "Le conseil décide de fixer au 30 juillet la fête patronale de la commune". Voilà donc sainte Madeleine promue patronne de la paroisse ! Qu'en pense saint André !

Pour le 11 Novembre 1933, on ajouta au programme la remise de la Croix du Combattant à ceux qui le désiraient.

Cette fois, la municipalité encadre bien la Sainte-Madeleine. En 1934, elle est encore fixée au 30 juillet et c'est Gustavec Chéron (photo ci-contre) qui est chargé de son organisation, des prix. Il encaisse à cet effet un budget en hausse de 250 F.

Le 24 mars 1935, constatant que l'école est désormais trop petite, il est décidé de la rallonger, ce qui permettra d'organiser là des fêtes communales.

Après de nouvelles élections, la commission des fêtes est renouvelée le 8 mai 1935. On y trouve Gustave Chéron, Augustin Bidaux, Georges Riaux et Louis Colignon.



La Sainte-Madeleine de 1936 chez Marie Chéron, à Claquevent. Quelle est cette famille ?

En 36, année agitée, la fête eut lieu le 26 juillet. Augustin Bidaux est nommé trésorier tandis que le projet d'agrandissement de l'école arrive à son terme pour servir aux loisirs des Yainvillais.



Participants à la Sainte-Madeleine à la terrasse du café du Passage.



Ci-dessus, le dos à la Seine, la famille Rigault durant la fête.

Charles Rigault est chauffeur au garage de la centrale où mon père est alors mécanicien. Rigault est né à Jumièges en 1904 et demeure à Duclair, rue Grandchamp, où son épouse, Séraphine Ouin est mercière. Ils sont ici en compagnie de leur fils Charles (1924-2000). Avec ses moustaches à la Vercingétorix, le personnage de gauche est sans doute Séraphin Ouin qui vit avec le couple. Natif d'Yvetot, il fut ferblantier puis fumiste.

En août 36, le nom de mon père apparaît pour la première fois dans les délibérations du conseil municipal. Raphaël Quevilly occupe en effet un logement municipal, mitoyen avec celui de Rachel Lefrançois, tout près de la mairie. A sa demande, l'électricité, des sanitaires et un dépôt d'essence seront installés dans sa maison et ses dépendances. Ce nom, il n'est pas anodin car il va jouer un rôle primordial dans le domaine des loisirs lors des quinze années qui viennent.

C'est alors que décède Gustave Chéron, l'adjoint. En décembre 36, Brunet est désigné pour le remplacer. Il refuse. Ce sera Le Doze, un Breton.

En mai 37, Dominique Piot vient remplacer Chéron dans la commission des fêtes tandis que Bidaux est reconduit comme trésorier. Le 6 juin, on précise que la fête patronale aura lieu "dans les locaux et sur la propriété privée" de Marie Chéron comme les années précédentes.

Le 15 décembre, marié depuis un mois et demi, Raphaël Quevilly fait sont entrée au conseil municipal. Il y apporte du sang neuf, étant issu de la bande de jeunes qui anime la plage d'Yainville.  Dès le 5 janvier 1938, mon père est nommé trésorier de la commission des fêtes. Il est entouré de Marcel Blaise, Louis Colignon et Paul Le Corre. Encore un Breton !...

Une Société locale de loisirs...


Le 1er mars 38, le conseil vote 1.000 F de subvention à la Société locale de Loisirs et de Sports qui préfigure l'USY. Elle vient d'engager la toute première équipe de foot d'Yainville.
La "fête patronale Sainte-Madeleine" est fixée au 31 juillet et la commission se réserve de choisir l'endroit.

 Le 15 juillet 38, on décide d'acheter un appareil de projection cinématographique. Il permettra à la Société locale de Loisirs d'organiser des séances récréatives. Du reste, le 11 Novembre suivant sera marqué par une projection de film.

Les travaux d'extension de la mairie sont réceptionnés en janvier 39. Encore de l'espace pour les loisirs. L'inauguration est fixée au 16 mars 39. Vin d'honneur, Rappel de Duclair, nouvelles projections de films. Et c'est de nouveau la guerre...
Raphaël Quevilly.
Comme en 14...


Au conseil du 1er octobre 39, les élus Blaise, Brunet, Piot et Quevilly sont absents. Et pour cause : ils sont mobilisés. la commune leur enverrra des vêtements chauds.
Après un parcours échevelé , mes parents, le fameux 18 juin 40, sont interceptés par les Allemands à Rochefort. 
Retour du couple à Yainville où l'on apprend que l'armée d'occupation entend faire une infirmerie du café du Passage, cadre de tant de fêtes.  Pour déjouer le projet, ma mère s'installe derrière le comptoir jusqu'au retour de sa tante, alors en exode. Mon père, quant à lui, réintègre la centrale sous la surveillance d'une vingtaine d'Allemands.
C'est la guerre, mais on fait encore la fête. La nuit du 13 avril 40, sortant d'un bal au Trait, Louis Leroux, chef de quart à la savonnerie, André Léplanche, charretier chez Garzinski et Marcel Mézou, chauffeur dans la même entreprise, sont fouillés plaine d'Yainville à 4 h 30 du matin. Ils ont volé 75 savons. Maison d'arrêt. Correctionnelle...

Raphaël Quevilly réapparaît au conseil à la séance du 20 juillet. Marcel Blaise est alors prisonnier. On enverra des colis aux captifs yainvillais. Raphaël Quevilly, Augustin Bidaux et Louis Colignon en sont chargés. Ces deux derniers n'ont plus que quelques mois à vivre.

Mais voici le premier 11 Novembre de l'Occupation. Doit-on honorer nos morts sous le nez des Allemands ? Mandaté par le maire, Raphaël Quevilly dépose une gerbe au monument en compagnie du père Herment. Et ça passe. En revanche, à Duclair, une figure de notre centrale habitant là-bas croit bon de dénoncer les "fautifs".

Comme en 14, le cœur n'est plus à la fête. Le 8 septembre 41, on décide cependant l'achat d'un terrain situé derrière  l'école pour y faire un terrain de sport. En attendant des jours meilleurs...


Laurent QUEVILLY.

Pour suivre : le petit bal de la Libération 

Sources


Délibérations du conseil municipal d'Yainville, numérisation : Édith Lebourgeois.
Recensements de la population d'Yainville et listes électorales
14-18 dans le canton de Duclair, Laurent Quevilly, BoD, disponible.
Le Pilote, collection complète.
Merci à Gilbert Fromager pour son aide concernant Ferdinand Lemaréchal.