Par Laurent Quevilly-Mainberte

Après la capitulation de l'Allemagne nazie, le 8 mai 1945, s'ouvrait pleinement l'ère de la Reconstruction. Nous allons vivre cette période jusqu'aux années 50.


19 mai 1945. Gaston Passerel, doyen de l'assemblée, préside à l'élection du nouveau maire. Étaient présents autour de lui MM. Blaise, Riaux, Piot, Le Corre, Quevilly, Gouard, Conchis et Suzanne Marotte qui fut nommée secrétaire de séance. André Bidaux est absent car il est mobilisé. 8 voix allèrent à Passerel et une à Marcel Blaise. Pour le poste d'adjoint, 8 voix allèrent à Blaise et une à Piot. Les opérations électorales avaient eu lieu le 29 avril.

Le 27 mai 1945, à 10h, le conseil municipal se réunit. Seul absent, André Bidaux, toujours mobilisé. On forma les commissions :
 
Travaux: MM Piot, Riaux, Gouard, Bidaux.
Fêtes: MM Quevilly, Le Corre, Conchis et Mme Marotte.
Répartiteurs titulaires: MM Wesolewski, Gouard, Piot, Louis Acron et le maire.
Suppléants: MM Macchi, Le Corre, Conchis, Triboutte et Ferté.
Bureau de bienfaisance. Président: le maire, délégués du préfet: MM Riaux, Pellerin, Quéré.
Délégués du conseil: Mme Marotte, MM Quevilly, et Le Corre.
Commission des chaussures: MM Piot et Papé.
Commission des textiles: Mme Marotte, M. Conchis.
Commission des pneus: Henri Beyer et  Gouard.

On vota des indemnités au garde-champêtre, la femme de service à l'école et l'aide du secrétaire de mairie.

Le 6 juin 1945, on proposa au directeur des contributions directes une liste de 21 répartiteurs et classificateurs: MM Gouard père, Piot, Conchis, Quevilly, Le Corre, Riaux, Bidaux, Beyer Henri, Marotte, Leguillochet, Le Doze fils, Avenel, Pourhomme père, Brunet, Thiollent, Papé, Cauchois, Vasse père, Maurice Edde, Rigaut, tous domiciliés à Yainville.

Le 2 juillet 1945, Raphaël Quevilly écrivit à la centrale électrique pour lui demander une contribution: "La commune compte 17 prisonniers et rapatriés et nous espérons que votre générosité nous aidera à leur remettre un livret le plus élevé possible." La distribution doit avoir lieu le 15 du mois.

La réponse de la centrale fut négative. Elle portait déjà secours à ses prisonniers :

Jean Lemarchand, Henri Gascoin, André Fontaine, Maxime Dossier, Émile Bellet, Marcel Blaise, Robert Cotelle, Henri Vigneux, Robert Oursel, Fernand Prunier, Louis Boutard, Alfred Tap, Jules Vincent, André Langanay, Paul Bellet, Lucien Vautier, Joseph Jégou, Sylvain Saudrais, François Laudé, non encore rentré.

Le 12 juillet, Raphaël Quevilly, au nom du comité des Fêtes, adressa une invitation à MM Denise, Petit, Huet, Montagné ainsi qu'au curé, l'abbé Coupel.

"Le comité d'accueil aux prisonniers vous invite à assister à la manifestation de remise du livret qui aura lieu le dimanche matin, 15 courant. Rendez-vous à 10h précises à la mairie pour se rendre ensemble à la messe d'actions de Grâces, suivie d'un vin d'honneur au cours duquel il sera procédé à la remise du livret. " On demanda aussi au préfet l'autorisation d'organiser un bal au profit du comité des Fêtes.


15 juillet 1945: Le matin, on se donne rendez-vous à la mairie pour se rendre à une messe d'actions de grâces suivie d'un vin d'honneur au cours duquel le comité d'accueil des prisonniers de guerre leur remet leur livret. Puis ce fut le bal de la Libération à la cartonnerie avec l'orchestre du Normandy Hôtel.

Le 26 juillet, Mustad fit un don de 1.000F au comité d'accueil au prisonniers. Le 28, Raphaël Quevilly écrivait à Berger Evensen, à Duclair, pour l'en remercier.

28 juillet 1945: don de Verhoest, de la société normande des corps gras en faveur des prisonniers de guerre et rapatriés. Idem de la part de Mustad, via Berger Evensen.

Ce même 28 juillet, Raphaël remercie aussi Verhoest, directeur de la Société des corps gras pour ses dons envers les prisonniers. Ils ont été déjà remis comme en témoigne ce reçu. "Je soussigné Leblond Roger reconnaît avoir reçu la somme de CENT CINQUANTE UN FRANCS du comité d'accueil aux prisonniers. Yainville, le 23 juillet 1945. Leblond Roger"

Alors qui sont ces prisonniers. Un projet de répartitions des 6.000F reçus en donne la liste précise:

Bidaux (59 mois de captivité ou déporté), Blaise (58 mois), Duval (43), Fourquet (58), Kubista (61), Langanay (60), Oliviero (58), Oursel (59), Resse (50) et Saudrais (60).

Il y a aussi les requis: Bénard (79 mois), Bocquet (51), Bréard (13), Decaux (23), Fontaine (18), Leblond (6) et Ponty (23).

Le 24 septembre 1945, les 10 élus se réunissent cette fois au grand complet. On fixa les loyers du patrimoine communal. "Les maisons Silvestre, louées 400 F sont portées à 800 F. La maison de Mme Lefrançois reste au même prix en raison de la situation de l'intéressée presque indigente. L'ancien presbytère loué 1100 F est porté à 1600 F. La maison de M. Quevilly est louée 500 F."

L'atelier public des bouilleurs de cru fut situé en bordure de Seine, sur le territoire de la Havraise, sous réserve d'acceptation du propriétaire. "En cas de refus, la prairie de M. Gouard sera désignée."
200F furent votés pour la souscription du monument interallié de New York.
Une allocation militaire est accordée à Bernard Edde et Henri Nouvel.
On proteste contre la nouvelle réglementation de répartition des pneus de vélo.
La commission de la reconstruction est formée Dominique Piot et André Bidaux. "M. Vasse remplacera M. Piot en cas de refus de celui-ci."
La commune paiera le pain et la viande de Mme Barnabé dont les revenus sont insuffisants.
Nouvelle séance le 28 septembre.
L'éclairage public est enfin rétabli gratuitement par la SHEE. Ne trouvant pas de gérant pour la cabine téléphonique publique, c'est Gaston Passerel qui s'en charge. Ce qui fait office de salle des fêtes est libéré de son locataire.

Septembre 1945 : L'appontement de la Havraise est jugé en bon état dans une étude de William Potvin. Une grue à cependant été détruite. Long de 86 m, en béton armé, il dessert des navires charbonniers de plus de 100 m. Les postes de navigation intérieure pour bateaux à faible tirant d'eau de Caudebec, Heurteauville et Yville sont en bon état. A Duclair, l'appontement à résisté avec ses trois postes d'attente. Il est très utile aux chalands et remorqueurs.

On proteste contre la répartition des pneus de vélo. La commission de la reconstruction est composée de Dominique Piot, agriculteur demeurant au bout de la sente aux Gendarmes (rue Jules-Ferry) et André Bidaux. L'éclairage public est enfin rétabli gratuitement par la SHEE qui vit ses derniers mois d'entreprise privée. Aucun volontaire pour gérer la cabine téléphonique, c'est la mairie qui s'en charge. La salle des fêtes de l'époque est libérée de son locataire.

Le 1er décembre 1945, les Quevilly se rendirent à Maisons-Alfort au mariage de Jacqueline Péruchet, filleule d'Andréa, avec M. Vidal.


1946


D’un alternateur qui ronronne
15.000 kilowatts-heure
portent dans le pays normand
FORCE ET LUMIÈRE

Des tourbillons de fumée noire s’échappent des grands tromblons métalliques sur montant la Centrale.
Ici, on fabrique du courant électrique et dans les isolateurs de la ligne à haute tension on entend grésiller l'électricité qui va porter la précieuse énergie à nos usines et  foyers.

Le fonctionnement de la Centrale

Yainville est une centrale thermique. Les alternateurs produisant l'électricité sont mus par des turbines à vapeur. L'essentiel est donc d'obtenir cette vapeur. Elle est fournie par quatre chaudières, type Alsthom, timbrées à 35 kgs. En marche poussée, chacune peut débiter 40 tonnes de vapeur tout en n’exigeant de la part des chauffeurs qu’un travail de surveillance. En effet, le charbon en grains concassés, « tête de moineau », est manipulé mécaniquement.
Une chaîne à godets le monte en haut de la chaufferie. Un convoyeur le répartit dans le magasin de chaque chaudière. Par de grosses conduites, il descend sur les foyers roulants « Roubaix » où, lentement, la chaîne de briques réfractaires qui sert de grille l’emmène à l’intérieur de la chambre de combustion. De puissants ventilateurs en dessous et au-dessus du foyer activent la chauffe, et ce ne sont que des cendres qui tombent lorsque la chaîne arrive au bout du rouleau pour recommencer un nouveau cycle. L’alimentation des chaudières en eau de Seine décalcifiée et filtrée est faite aussi automatiquement par le système « Copes ».

Les possibilités actuelles

En ce moment, une seule turbine, 15.000 kwh, haute pression, est en état de marche. Une autre semblable a eu une butée et un palier de grillés il y a environ un mois. Elle est actuellement en cours de remontage. Une troisième turbine haute pression, type Oerlikon, de 6.000 kwh vient d’être finie de remonter et subit déjà ses essais. Ces 3 turbines avaient été sabotées par les Allemands lors de leur départ.
La Centrale possède également une turbine basse pression de 1.500 kwh et une autre de 5.000, mais les Allemands les ont rendues inutilisables et les 6 génératrices basse pression, timbrées à 16 kgs, qui les alimentaient, sont à l’heure actuelle complètement usées et pratiquement hors de service.
Pour décembre, la production brute de la Centrale a été de 4.696.731 kilowatts-heure, ce qui met la production journalière à 16.000 kwh, maximum ne pouvant être dépassé sans risque d’avaries graves pour le matériel.

Le problème du charbon

Pour assurer cette production, il faut 110 tonnes de charbon par jour. Des portiques intacts permettent un déchargement rapide et facile des wagons. Le stock de sécurité de 3.000 tonnes déjà constitué assurera une marche continue, au rythme maximum, jusqu’à la soudure du printemps. Aussi partageons-nous l’optimisme du directeur et des ingénieurs quant à l’avenir de leur Centrale.
Pourtant, une amélioration pourrait être apportée. A l’heure où le manque de matériel roulant se fait particulièrement sentir, des wagons seraient libérés par l’utilisation de péniches charbonnières.
L’appontement de la Centrale de Yainville est intact, mais deux péniches coulées par les Allemands en interdisent l’emploi. Depuis plusieurs mois, la direction en a demandé le relevage, mais jusqu’ici rien n’a été fait par les Ponts et Chaussées.

Les clients de la Centrale

Dans son bureau, le directeur qui nous reçoit très aimablement nous explique l’importance de la Centrale. C’est elle qui fournit les Chantiers du Trait, la Standard de Port-Jérôme, la Société de Constructions Aéronautique! de Caudebec, la clouterie Mustad. Toutes les usines du textile de la vallée de l’Austreberthe sont des clientes de Yainville, dont le courant va jusque dans l’Eure, aux papeteries de Pont-Audemer.
Et comme toutes les centrales, Yainville est-reliée à l’interconnexion par le poste de la Vaupalière, au-dessus de Dieppedalle. Seulement, le transformateur 90.000 volts ayant été avarié le 28 décembre, la liaison avec la Vaupalière, le Havre, et la Centrale de Grand-Quevilly se fait uniquement en 30.000 volts.

L’avenir de Yainville

Étant donné le rôle de la centrale dans l’industrie de notre département, les plans d’une super-centrale ont été établis dont la première phase devra être terminée dans un temps maximum de cinq ans. Les turbines d’une puissance globale de plus de 50.000 Kwh seront alimentées par six génératrices timbrées à 85 kg. et marchant au charbon pulvérisé. Mais cela c’est l’avenir. Pour le présent, les 150 ouvriers et employés, groupés dans leur syndicat cégétiste, travaillent à maintenir le maximum des 16.000 Kwh journaliers. Ils prouvent leur dévouement et leur conscience professionnelle. Aussi espèrent-ils que leur retraite sera améliorée et que même absents de l’usine à 55 ou 60 ans, ils ne perdront pas complètement le bénéfice de leurs versements antérieurs. 

CHAMBORD
(L'Avenir normand,  18 janvier 46)

Drame familial, le 7 février. Alors qu'il joue dans une grange, celle-ci s'effondre. Mon cousin Marcel Quevilly meurt. Ce qui provoquera la séparation de mon oncle et de sa femme Georgette.


En 1946, on récompensera les personnes ayant aidé les aviateurs alliés. MM Evensen et Marcel Godalier, Marguerite Pattenotte, Marcel Rannou, tous de Duclair, Gontran Paris et René Martin, du Trait. En revanche, l'Avenir normand du 23 février nous dit :

Victoire de la CGT

Grâce à l’intervention énergique du Syndicat de la S.N.C.G., un ex-collaborateur, déclaré en état d'indignité nationale et qui voulait réintégrer ses fonctions dans cette usine, a dû baisser pavillon et renoncer à son projet.
Une fois de plus il est donc prouvé que seule l'union de tous les ouvriers patriotes au sein de la C.G.T. permettra de faire passer 1e souffle républicain dans les entreprises, afin de redonner à notre pays son véritable visage.

Mars 1946 : On intervient auprès des services de la reconstruction pour que les maisons sinistrées soient remises en état.

8 avril 1946 : nationalisation de la centrale. On éprouve toujours des difficultés à se ravitailler en viande. Le conseil décide de procéder lui-même à l'abattage pour assurer la ration des Yainvillais. A la savonnerie, les vols de savon se multiplient et de nombreux fautifs seront appréhendés.

6 mai 1946 : le conseil demande le classement de Yainville parmi les communes à suppléments nationaux.

Les élections approchent. Le PC dénonce une manœuvre d'intimidation. Jeudi soir, 23 mai, un de nos camarades parlait à Yainville. La salle l’applaudit et à la fin de la réunion, aucun contradicteur ne prit la parole. Mais M. Lepicard, le gros agriculteur bien connu dans la région et dans notre département, prit alors un de ses ouvriers agricoles par le collet et lui dit textuellement :« Vous avez applaudi tout à l’heure l'orateur communiste. Demain, vous serez renvoyé ».

Durant l'été, les Quevilly retrouvent la Bretagne à Ploubalay, Saint-Cast... Le 11 août, ne photo rassemblent plusieurs Yainvillais devant la mairie après messe. Ce même mois, Solange et Raymonde Mainberte sont à Yainville. On ira le 18 à Deauville avec Louise et Odile Colignon ; le 25 à Dieppe avec les Levasseur et Solange.

Septembre 1946 : des baraques pour les sinistrés seront construites dans la cour de Madame Monchy, donc tout près de la future maison des Quevilly. En haut de la côte de Jumièges, un terrain est proposé aux nomades. Menée par Duvauchel, une délégation de l'amicale de SNCG d'Yainville participe à une cérémonie à Barentin en mémoire de Julien Lechalupé, mort dans les bombardements en Allemagne. Ce mois-là, trois jeunes Yainvillais jouent avec la grenade qu'ils ont trouvée. Elle explose. Michel Duval est tué, Michel Fabulet et Michel Turmel grièvement blessés.

Les Quevilly réveillonnent pour la Saint-Sylvestre avec les Colignon, les Deshayes et leur fille Jacqueline ainsi que l'époux de cette dernière.


1947


Lundi 3 février : Narcisse Ponty, 21 ans, d'Heurteauville, est occupé à la savonnerie au déchargement d'un camion. Quand à la suite d'une fausse manœuvre il a la tête broyée entre la benne et le châssis.

15 février 1947 : Le conseil démissionne pour obtenir son classement de commune à suppléments. 340 habitants.

Le 15 mars, notre cousine, Camille Bessin, épouse Paul Levasseur. Raphaël Quevilly est parmi les témoins.

Le 30 mars, les Quevilly et leurs amis Nouvel se rendent à Bruneval écouter de Gaulle, invité par le colonel Rémy à inaugurer un monument.

Avril 1947 : tirage au sort pour l'attribution de baraquements aux sinistrés. Ce mois-là, les Quevilly se rendent à Paris avec Odile Colignon, Cécile Kubista et son ami. Ils visitent le zoo de Vincennes.  Ils retrouvent les Deshayes, venus visiter Thérèse. On va aussi chez Émile Mainberte, à Maisons-Alfort.

Le 7 juillet 1947, la société locale de loisirs et de sports reprend ses activités. Jacques Combe, président de la société normande de corps gras, l'inscrit à la fédération française de football et à celle de cyclisme sous le sigle de l'USY.

Le 13 juillet, les Quevilly se rendent en Bretagne, à Kerjouano, où les Mainberte ont leur résidence d'été. Raphaël et Andréa ont loué une maison près du port du Croesty. Le 18 juillet, ils assistent au départ de la caravane du Tour à Vannes. Après sept ans d'arrêt, la grande boucle sera gagnée par Robic. Les vacances sont marquées aussi par une escapade à Belle-Ile où Andréa prend place dans le fauteuil taillé dans la roche pour le séant de Sarah Bernard. Sur la plage de Kerjouano, André Gueridère, Eliane Leguay qui accompagnent les Quevilly à Yainville avec halte à La Baule.

Le 13 août, Anatole Bessin, Henriette et Marcel Quevilly, séparé de son épouse, déjeunent maison Rachel. Raphaël est président de la commission des sports et loisirs.

Démonstration à Yainville

2 septembre, L'Avenir normand. — Les ouvriers du chantier de Yainville, Entreprises Marion et Fourré et Rhodes, au nombre de 300, ont protesté énergiquement contre la diminution des rations de pain et contre la hausse du
coût de la vie. Ils ont arrêté hier le travail pour 24 heures. Il en fut de même aux entreprises Chouard et Versillet (Le Trait) et à la Centrale d’Yainville.
En ce début de mois, décès de Jean Chabannat, 39 ans, chef d'équipe.

18 septembre


A YAINVILLE
Un ouvrier tombe d’une hauteur  de 15 mètres
et se fracture une jambe


Hier soir, à 17 h, 30, un accident qui aurait pu avoir de graves conséquences, s’est produit à la nouvelle Centrale de Yainville, dans un bâtiment actuellement en construction.
Plusieurs ouvriers de l’entreprise Fourré et Rhodes, de Paris transportaient une poutre au troisième étage de cet immeuble. lorsque pour des raisons inconnues, l’un d’eux, M. Raymond Brousin, 19 ans, aide charpentier, domicilié à Noircourt, dans l’Aisne, tomba d’une hauteur de 15 mètres. Dans sa chute, il fut arrête à 6 mètres du sol par le second étage et se fractura la jambe gauche sur le ciment. Descendu par ses camarades à l’aide de cordages et d’une échelle, il fut transporté par les soins de l’entreprise à l’Hôtel-Dieu de Rouen.


A la fin du mois, deux syndicalistes de la CNT tentent de prendre la parole à la cantine. La sirène les fait parler dans le vide, ce qui réjouit le PC.

27 octobre

A Yainville

Un câble d’une drague se rompt
et blesse mortellement notre camarade
Henri Duhamel


Samedi, vers 18 h. 30, un grave accident a coûté la vie de notre camarade Henri Duhamel, maçon, prisonnier de guerre, candidat à la liste d’Union Républicaine et Résistante de Saint-Paër. Notre camarade venait de quitter l’usine de la Société des Corps Gras de Yainville, où il est employé, lorsque pour une cause encore inconnue un câble d’une drague amarrée en Seine près de la route se rompit et vint frapper à la face Henri Duhamel qui passait à bicyclette à proximité. Très grièvement blessé, notre camarade fut immédiatement transporté en voiture automobile
à l’Hospice Général de Rouen par les soins de la Société Fouré et Rhodes.
Notre ami ne devait pas sur vivre à ses blessures et décédait dans la nuit, à 24 heures.

30 octobre 1947 : installation du nouveau conseil municipal comprenant MM. Raphaël Quevilly, Gaston Passerel, Marcel Blaise, Henri Mezeray, Paul Le Corre, Henri Beyer, Eugène Charles, Théophile Pourhomme, Georges Piot, Jean Lévêque et France Marcilloux. Au premier tour de l'élection du maire, Passerel obtint 10 voix contre une pour Raphaël Quevilly, la sienne. Au second tour, Blaise obtint six voix pour le poste d'adjoint contre cinq pour Quevilly.

En novembre, les Quevilly sont à la foire Saint-Romain avec Odile Colignon et Cécile Kubista.

27 novembre vers 17 h. 15, un très grave accident s’est produit à la Centrale. Deux ouvriers, Maurice Legras, habitant Paris, et Jules Samier, de Caudebec, ont été électrocutés. Brûlés très grièvement, les deux infortunée ouvriers ont été conduits à l’Hospice Général par l’ambulance du Trait.

Décembre 1947 : le 2, une Union sportive électrique de Yainville est lancée par des adents de la centrale. Le cinéma cantonal reprend ses activités à la salle des fêtes. Prix des places: 10F et 30F. On est toujours à la recherche de bons pour obtenir des torchons et du savon pour l'école.


1948


L'année 1948 sera marquée par le lancement des travaux d'une nouvelle centrale comprenant deux tranches de 50 kw. Cette année-là, mon père va acheter à Mme Dorléans un terrain de 800 m2 situé sente aux Gendarmes, entre la cour de l'école des garçons et la prairie de Mme Monchy.

Début avril

Chez FOURRE et RHODES à Yainville
les ouvriers s’opposent victorieusement au lock-out patronal


L’entreprise Fourré et Rhodes, à Yainville, avait refusé de payer les frais des délégués d’établissement aux conférences nationales des Comités d’entreprise des 2, 3 et 4 avril. Les délégués décidèrent une réunion syndicale le 31 mars, de 13 à 14 h., pour en informer les ouvriers. Mais la direction voulut interdire leur réunion. Malgré le veto du directeur et malgré les menaces patronales de lock-out jusqu’au lendemain, les ouvriers décidèrent de se réunir quand même. Rien n’y fit, pas même la pression des chefs d’équipes et la réunion eut lieu. Les ouvriers décidèrent alors, dans l’enthousiasme, de faire entre eux une collecte pour que le chantier puisse être quand même représenté à la Conférence nationale.
A 14 heures précises, les ouvriers voulurent se mettre au travail, mais l’électricité avait été coupée. La menace avait été mise à exécution. Après deux heures et demie de lutte avec la direction, et grâce à l’unité des ouvriers, le directeur dut faire reprendre le travail à 16 h. 30.
Que la direction et M. Javet fils en particulier sachent que les ouvriers sont bien décidés à conserver le libre exercice de leur droit syndical. Ils ont su lui donner une idée exacte de la force qu’ils représentent groupés dans leur section syndicale de la C.G.T.


25 revendications ! 19 avril, quatre jours de grève chez Fourrés-Rhodes, entreprise parisienne du bâtiment employée sur le chantier de la centrale, se soldent par la victoire des 400 ouvriers. Le fils Javay est venu négocier la chose avec la CGT et le représentant d'EDF, Teste-Bidault. "Fiers de cette victoire, les gars du bâtiment remontaient sur les échafaudages vers ce soleil qui ne doit pas briller que pour les gros patrons."

15 mai.

Deux accidents mortels en cinq semaines, c'est trop !


Deux accidents mortels en 5 semaines, c’est beaucoup trop chez Fourré-Rhodes. Pourquoi le premier, notre camarade Kervern, a été victime de sa conscience professionnelle ? La fosse de la bétonnière étant pleine de sable et gravier ce dernier est descendu de son poste de conducteur pour la nettoyer. Si cette machine avait été munie d’une chaîne de sécurité, l’accident était évité. Les camarades du chantier ont fait une collecte qui a rapporté la somme de 13.900 fr. L’habitude de la maison est de verser la même somme, mais du fait qu'elle a payé les frais du transfert à Oérences (Manche), elle se fait tirer l'oreille pour verser cette somme à la veuve, mère de six enfants.
Cette entreprise fait pousser la production à l'extrême par son chef de chantier, M. Pichon qui est craint comme le feu, car il n'hésite pas à priver un ouvrier de son travail pour un oui ou un non, et quelques chefs inconscients
suivent son exemple (sans penser qu'ils ont aussi passé une partie de leur vie comme ouvriers).
Le deuxième accident provient de cet état de chose : produire toujours plus avec moins de monde pour arrondir les bénéfices de cette société ; l’ouvrier attache vite, l’autre travaille sous une grue, un chef qui rouspète, un fil de fer qui casse, et voilà une victime de la rationalisation capitaliste de plus.
La classe ouvrière est assez consciente de ses droits et de ses devoirs pour ne plus tolérer de telles choses. Elle demande une Commission de sécurité sous le contrôle des ouvriers et un peu moins d'arrogance de la part du chef de chantier.
Les ouvriers réclament enfin que leur camarade Agosti, étant sans famille en France soit enterré à Yainville dans un caveau, et ce aux frais de l’entreprise.

En 1948, écrit un lecteur, mon grand-père maternel, Piétro Lenarduzzi, travaille sur le chantier de la nouvelle centrale électrique de Yainville. Il fait venir sa femme et ses deux enfants en France, Ils habitent dans le logement situé à l’étage de l’ancienne épicerie Legendre en bord de Seine. 

1er juillet 1948 : Obtention du classement avec l'appui d'André Marie, devenu président du conseil. Ce mois-là, Rigoult remplacera Vasse tant que celui-ci n'aura pas de cheval pour ramasser les ordures. Des pancartes sont commandées chez Houssaye, menuisier à Jumièges. La vitesse dans le village est limitée à 20 km/h pour les camions et 30 km/h pour les voitures.

Ce mois de juillet, les Quevilly se rendent en vacances à Ploubalay avec la famille Prestot, du Trait, et louent la maison Tavé. Visites de Dinan, Dinard, traversée de la baie jusqu'à Saint-Malo, pêche aux Ebhiens. Le gouvernement Marie n'aura duré qu'un mois. Il est renversé.
Drame familial. Le 4 septembre, à 11h, mon cousin Rémy Platel est happé par une machine à la filature du Paulu. Il avait 15 ans.

Le 1er octobre 49, mon frère retrouve la classe de Mlle Lafosse, militante communiste, candidate aux élections. Les Quevilly rendent visite quelques jours plus tard aux Deshayes, amis d'enfance d'Andréa, à Bapeaume.

Son terrain acheté, mon père commence seul la construction d'une maison avec des briques récupérées dans les bâtiments bombardés à la centrale et nettoyée une à une de leur ciment. Les fondations seront creusées à la pelle.

Carnet

Meckes Marie-Rose Anne, Yainville 15 décembre 1948 - Clichy 5 juillet 1971.


1949


Le 25 janvier 1949, mon grand-père rend l'âme à Saint-Paër.

En février, la cellule du PC compte 45 adhérents à la centrale, se réjouit Jean Marquine, demeurant route du Bac.


4 mars

Il y a des choses bizarres à Yainville et à la C. N. A. Lundi dernier, grande visite des pontifes à la Centrale de Yainville, avec les Chastellain, Breteché et Compagnie : une vingtaine d’autos et un car de la C.N.A. pour 15 personnes. La direction avait bien fait les choses pour les recevoir : flèches signalisatrices, hauts-parleurs, parcs, etc... en tout pour près de 800.000 fr. Qui paiera ? Qui paiera aussi le banquet à Duclair ? Les travailleurs de la Centrale se le demandent et la population aussi, notamment tous les usagers de la C.N.A. qui
restèrent en rade dimanche soir sur la ligne Rouen-Le Havre, malgré le car supplémentaire que notre camarade Lecoq réussit à faire partir de Rouen, malgré la volonté de la C.N.A.


Le 17 avril, mon frère aîné est baptisé par l'abbé Coupel. Les parrains sont Marcel Quevilly et Thérèse Mainberte. Après déjeuner, on va visiter le chantier de construction de mon père.


22 avril, L'Avenir normand.

GRÈVE A YAINVILLE
chez STEIN- ROUBAIX (Bâtiment)
où la manœuvre des licenciements arbitraires est démasquée


Vendredi dernier, à 16 h., les 50 ouvriers qu’emploie la maison Stein-Roubaix a ses travaux de charpente métallique sur le chantier de la Centrale de Yainville se sont mis en grève.
C’était la riposte spontanée à une manœuvre de licenciements arbitraires que la direction renouvelait sous une autre forme après un essai infructueux subi une semaine auparavant.
Pour la première tentative chaque ouvrier avait été appelé individuellement et placé brutalement devant l’alternative : être déclassé (ce qui ramenait le salaire d’un manœuvre de 66 fr. à 53 fr, de l’heure) ou être licencié. Inutile de dire que ce fut une protestation immédiate et que la direction dut abandonner son projet.
Mais ce n’était que momentané car vendredi dernier, elle procédait à 8 licenciements : 2 monteurs, 2 aides-monteurs et 4 manœuvres. Évidemment les deux délégués titulaires de la section syndicale étaient dans ce nombre ! Le prétexte invoqué « licenciements pour fin de chantier » ne tenant absolument pas puisque la direction avait déjà embauché 3 manœuvres nord-africains au rabais et fait venir 2 monteurs de l’extérieur, les ouvriers unanimes ont débrayé. Conscients de cette attaque nullement déguisée contre leurs salaires, tous les ouvriers, métallos et gars du bâtiment employés à Yainville, suivent le conflit avec vigilance, et organisent la solidarité envers leurs camarades de chez Stein-Roubaix.

29 avril

Succès dans le bâtiment
chez Stein et Roubaix à Yainville

Vendredi matin une entrevue avait lieu à l'Inspection du Travail de Rouen entre une délégation ouvrière de l'entreprise Stein et Roubaix et une délégation patronale, à la suite du conflit éclaté sur le chantier de la Centrale de Yainville par suite du déclassement des salaires et du licenciement des manœuvres.
Soutenue par l’action unanime des ouvriers du chantier et la solidarité agissante des autres entreprises qui débrayèrent le jeudi soir à 17 heures, la délégation syndicale, conduite par Roger Sporry, secrétaire de l’Union Départementale de la C.G.T., arracha un gros succès.
Au lieu du déclassement prévu ce fut en effet un reclassement qu’elle obtint. Aucun manœuvre
ne serait désormais embauché à moins de 63 fr. de l’heure et les salaires de ces derniers tombés à 56 fr. seront relevés à 63 fr. avec le rappel depuis le déclassement. D’autre part, les aides-monteurs ayant plus de 6 mois de pratique seront augmentés de 63 fr. à 72 fr. avec rappel également.
Enfin la direction de l’Entreprise Stein et Roubaix s’est engagée à réembaucher le personnel, licencié la semaine dernière, dans les catégories professionnelles dont elle a besoin pour continuer ses travaux sur le chantier.
Dans ces conditions, le travail a repris normalement à Yainville, où, après cette importante victoire, tous, les ouvriers du Bâtiment se préparent à une grande et puissante manifestation pour le 1er mai.

Le 25 mai, au Trait, ma cousine Maryvonne Peyrot fait sa communion solennelle.

1949 : l'équipe de foot va s'étoffer avec le personnel EDF. Le 6 juillet, l'USY est agréée par la direction départementale de la jeunesse et des sports.
Ce mois-là, les Quevilly ne prendront pas de vacances. Chantier oblige...

8 juillet.

Dernière minute
ARRESTATION arbitraire à Yainville
d’un héros espagnol de la Résistance

Au moment de mettre sous presse nous parvient, du chantier Fourré-Rhodes, à la centrale électrique de Yainville, une nouvelle particulièrement grave.
Deux inspecteurs de la Sûreté se sont présentés à 11 heures, sur le chantier, et ont arrêté l’ouvrier espagnol Angel-Arias Lopez, qu’ils ont emmené à Rouen, d’où il doit être dirigé sur Dax.
Quand on saura que Lopez. antifasciste espagnol, compagnon de lutte du grand héros Cristino Garcia, fut un des organisateurs des maquis F. F. I. en Gironde et dans les Landes, sous l’occupation allemande, on volt déjà que l’on se trouva devant un nouveau coup porté à la Résistance.
Mais comme Ramadier a dû libérer jeudi, Jean Le Jeune, libérateur de la Bretagne, il devra libérer Lopez devant l’indignation populaire.

15 juillet

DÉBRAYAGE d’un quart d’heure au chantier de YAINVILLE
pour la libération de LOPEZ héros espagnol de la Résistance
arbitrairement POURSUIVI


La semaine dernière, nous nous sommes indignés que des journaux comme « Paris-Normandie » et « Le Havre-Libre », issus de la Résistance, n’aient trouvé aucun mot de protestation contre l’acquittement scandaleux par la haute-Cour de Justice du préfet collabo de Normandie Parmentier. Aujourd’hui, force nous est de constater que ces journaux ne se souviennent plus des sacrifices de ceux qui, par leur lutte contre l’occupant, ont permis leur parution.
« L’Avenir » a, en effet, été le seul journal de Seine-Inférieure à informer ses lecteurs et à protester vigoureusement contre l’arrestation arbitraire mercredi dernier, sur le chantier de la centrale électrique de Yainville, du héros espagnol de la Résistance, Angel Arias Lopez.

Héros de la Résistance

Compagnon de lutte de Cristino Garcia, l’intrépide que Franco a fusillé
après l’avoir repris en 1947, Lopez, antifasciste espagnol, fut un des organisateurs de la Résistance dans les Landes. 
Décoré de la Croix de Guerre pour ses courageuses actions dans la région de Dax, il se remit avec ardeur au travail dans sa patrie d’adoption. Ouvrier consciencieux et respecté de tous, il était bien connu sur le chantier de Yainvllle où il était ferrailleur.

Traité comme un criminel

Pourtant c’est cet homme que des inspecteurs de la Police mobile sont venus arrêter à son travail le mercredi 6 juillet, qui a été conduit A Bonne-Nouvelle, menottes aux mains comme un criminel, passé au contrôle anthropométrique comme un vulgaire droit commun.
C’est Angel Arias Lopez que l’on a ramené à Dax, entre une escorte de gendarmes avec de nombreux autres résistants, français et espagnols. Pourquoi ? Parce qu’au cours des durs combats de la Libération, un traître a été abattu sur ordre de la Résistance et que, maintenant, sous le règne de Queuille, de Ramadier et de Moch, ce sont les résistants qui ont tort et les traîtres qui ont raison.

La protestation populaire
doit arracher la libération de Lopez

Dès le lendemain, un débrayage unanime eut lieu sur le chantier de Yainvllle. Une délégation ouvrière accompagnée des dirigeants de l’Amicale des Anciens F.F.I. - F.T.P. de Rouen se rendit aussitôt, dans la soirée à la Préfecture où elle remit une résolution réclamant l’arrêt des poursuites engagées contre Lopez.
Dans la région de Dax où l’arrestation des compagnons de Lopez a également créé une grosse émotion, des actions identiques sont menées.
Comme Ramadier vient d’être obligé de relâcher les héros de la Résistance, Jean Le Jeune de Bretagne, et le capitaine Serbat, de Pris, il faut que Lopez soit remis en liberté avec ses camarades.
Puisque la Résistance est attaquée, qu’elle s’unisse pour se défendre.

Le 6 août, on fête la Saint-Laurent à Saint-Paul. Concours de pêche, jeux d'enfants, gymkhana motocycliste, mât de cocagne, participation du Rappel, bal, crochet.

18 novembre

Derrière les millions de la publicité Catox

VOICI L'ENFER DES OUVRIÈRES
de la Société Normande des Corps Gras
à YAINVILLE
pour 2.240 fr. par semaine


Catox ! Catox ! Lavez avec Catox ! Nettoyez avec Catox ! Publicité, radio, vedettes prônent  à qui mieux mieux les vertus des produits Catox. A Radio-Luxembourg, l'émission de Catox, Reine d'un jour, coûte des millions par mois, ça c'est l'endroit de Catox, quand à l'envers,  voyons-le à la Société Normande des Corps Gras, à Yainville, qui travaille pour le compte de Catox.
Là, pour un salaire de 2.440 fr.  par semaine, des ouvrières peinent dans un véritable enfer, saturé de vapeurs nocives qui leur rongent la peau. Pour se protéger la bouche et le nez, elles sont obligées de se bâillonner avec leur mouchoir. Pas de sièges pour elles ! Seulement une caisse en bois de ci, de là. Aucune mesure d’hygiène, des méthodes de travail inhumaines. Voilà qui détonne avec l’onéreuse publicité de la radio que paient évidemment ces ouvrières par leur travail malsain et ridiculement rétribué.

C’est pourquoi la semaine dernière, excédés de travailler avec des salaires aussi bas, les ouvriers employés au déchargement des péniches ont fait un mouvement à la suite duquel ils ont obtenu une prime de 20 % pour la durée des opérations de déchargement.
C’est pourquoi enfin, sans attendre la journée départementale revendicative du 15 novembre, le jeudi 10, de 14 h. 30 à 15 h., le personnel composé de 235 ouvriers et ouvrières débrayait à l’unanimité pour appuyer ses délégués déposant les revendications.
C’était là un premier avertissement et les mesures de répression patronale ne pourront arrêter cet élan.

A Yainville, les ouvriers de Fourré-Rhodes cessent le travail plusieurs heures, imités par les petits chantiers environnants. Soit 400 ouvriers sur la construction de la centrale.

Début décembre 49 : "... n'est-ce pas une initiative très heureuse qu’a eue la cellule d’entreprise de Yainville, en organisant une assemblée d'information ouverte aux sympathisants, pour le 10° anniversaire de Staline? Trois jeunes y ont donné leur adhésion à notre Parti et se sont inscrits à l’école élémentaire qui a pris le nom de « promotion Staline ».
Si nous avons beaucoup à donner à Staline, nous avons aussi beaucoup à apprendre de lui."

Le 14 décembre, les ouvrières de la savonnerie s'expriment dans l'Huma : A propos de vœux « Catox... Catox..», Radio-Luxembourg donne chaque semaine son émission. Au cours de celle-ci certains « vœux » sont réalisés.
Savez-vous au prix de combien de peines pour nous, femmes qui travaillons à la Société Normande des Corps Gras à Yainville (Seine-Inférieure), donc pour « Catox » ? En 8 heures, travaillant sur quatre machines nous devons sortir 38 caisses de 80 boîtes (250 gr.) sur chacune d’elles. Ce travail est payé 2.330 francs pour 40 heures par semaine. Cadence infernale et dans dès conditions pénibles. Assises sur de simples caisses, nous devons nous protéger la bouche et le nez avec un foulard. Le « Catox » très malsain. pour les voies respiratoires l’est aussi pour l’estomac, et plusieurs femmes se plaignent de maux douloureux.
Nos « vœux », c’est la prime de 3.000 francs mensuelle et pour tous et de meilleures conditions de travail.Pour l'obtenir, déjà, nous avons débrayé et nous continuons la lutte.
Les patrons peuvent satisfaire nos revendications. En 1947, ils avouaient plus de 27 millions de bénéfices, pour 1948, ceux-ci, se sont élevés à près de 65 millions de francs.


Le 18 décembre, maison Rachel, ma mère accouche d'une fille qui, hélas, rend l'âme. La  vie de Catherine Marie Quevilly aura été bien éphémère.


Laurent QUEVILLY.

Pour suivre : les années 50

Sources 


Journal de Rouen, Journal du Trait
,
Délibérations du conseil d'Yainville numérisées par Édith Lebourgeois.
Ouvrages de Gilbert Fromager, Paul Bonmartel.
La vielle maison, montage audiovisuel de Jean-Claude Quevilly.