Le
plan de la propriété Samson puis Sabatier
La plainte du lieutenant
Le 28 février 1866, le sieur Leroy porte plainte auprès du sénateur-préfet. Leroy est lieutenant des Douanes retraité, demeurant à Caudebec, mais possédant une ferme au Trait, en haut d'un falaise où passe encore l'ancienne sente allant à Jumièges.
Au pied de la paroi, un certain Samson est propriétaire d'une carrière à ciel ouvert. Et il creuse, Samson, il creuse tant que Leroy crie au danger. Au danger et à la spoliation !
"Le dit Samson n'a d'autres buts que de s'emparer du chemin et des propriétés voisines au moyen des éboulements qui, nécessairement, devront s'ensuivre et qui verseront dans sa masure, au pied des rochers, les terres arables des particuliers, objets de sa convoitise.
Le silence des maires
"Le coupable silence des maires du Trait et d'Yainville en cette désastreuse circonstance est inqualifiable, il a ajouté à la hardiesse de l'anticipateur.
"C'est pourquoi, Monsieur le Préfet, j'ai cru devoir en cette occasion appeler votre justice et votre bienveillante sollicitude à la vue d'un péril aussi grave compromettant à la fois la sûreté publique et les intérêts des propriétaires voisins...
Le 21 mars, l'ingénieur ordinaire des mines se rend sur place. Il nous livre dans son rapport un intéressant historique.
Plusieurs chantiers
"La partie de la rive droite de la Seine comprise entre le village du Trait et le hameau de Claquevent, dépendant de la commune d'Yainville, sur une longueur d'environ 1500 mètres, est formée d'une étroite bande d'alluvion longeant le pied d'une falaise plus ou moins abrupte. Cette bande étroite est couverte de masures. La falaise a été sur presque tous ses points attaquée par des extractions de blocs calcaires. Ces exploitations, qui avaient l'avantage d'élargir l'emplacement des vergers, donnaient du bloc de bonne qualité qui a été employé en quantité considérable dans les travaux d'endiguement exécutés dans la partie voisine de la Seine.
"Actuellement encore, un certain nombre de chantiers sont en activité et les entrepreneurs des travaux de la Seine les exploitent, soit en raison d'arrangements avec les propriétaires, soit sous le couvert de décisions administratives.
"Le sieur Samson, sur les carrières duquel le sieur Leroy, plaignant, appelle l'attention, est propriétaire d'une partie du terrain que nous venons de décrire, sur 380m environ de longueur, à cheval sur les deux communes de Yainville et du Trait. La portion de falaise qui lui appartient a été naturellement, comme celles de ses voisins, le siège des extractions de blocs.
L'antique sente
"Une sente, à l'usage des piétons, dite de Jumièges au Trait, suivait autrefois le bord de la falaise, depuis son origine jusqu'au Trait. Cette sente, d'un parcours assez incommode, à cause des ondulations et des gorges plus ou moins profondes qui découpaient la falaise, à d'abord été refoulées sur plusieurs points par les travaux des carrières dans les parties les plus voisines du village d'Yainville. Enfin, dans cette région, elle a fini par quitter la falaise et s'établir dans les masures mêmes qui en bordent le pied.
"Il n'en est pas encore ainsi dans la partie la plus voisine du Trait et en particulier au droit de la propriété Samson. Et bien que la circulation se fasse presque entièrement par les masures, la sente règne encore sur le front de la falaise et plusieurs rampes montant obliquement permettent d'y accéder du terrain inférieur.
"Mais cette voie est si peu fréquentée que les labours l'ont peu à peu envahie et réduite presque à rien, notamment sur un terrain appartenant au plaignant.
"Dans cette partie de la sente, les travaux des carrières s'en approchent à une distance variable qui atteint un minimum de 3 m pour une hauteur de front de taille de 10 à 12 m, en quelques points de la propriété Samson. Mais cette proximité ne nous semble présenter aucun danger. D'une part la falaise est très solide, de l'autre la crête de la côte est couverte, sur toute sa longueur, d'une bordure de bois et de buissons qui en défendent l'abord d'une manière très complète.

Détail d'une carte postale. A gauche: l'église du Trait.
Sur la rive: des propriétés. Ou se trouvait celle du Sieur Sabatier ?
"Les travaux sont abandonnés dans la partie de carrière où le front d'attaque est à la distance minimum de la sente et ils n'ont lieu actuellement que dans une partie assez éloignée de la sente, à la même distance d'ailleurs qu'une exploitation ouverte sur le terrain voisin, appartenant à M. Leroy, plaignant.
"M. Samson nous a déclaré qu'en laissant exploiter son terrain par les entrepreneurs de la Seine, il avait toujours entendu que les limites de sa propriété ne seraient pas dépassées et que c'était par son ordre que l'exploitation avait été abandonnée dans les parties les plus avancées. Qu'il avait jusqu'à ce jour d'ailleurs exercé une surveillance personnelle constante et qu'il continuerait à surveiller de même.
"De ce qui précède, il nous paraît résulter que les craintes du sieur Leroy n'ont pas de fondement et nous croyons qu'il n'y a pas lieu de donner suite à sa plainte.
Le rapport est daté du 4 avril 1866. Il est approuvé le 9 par l'ingénieur en chef.
Rebondissement en 1869
Trois ans plus tard, on ne dit plus carrière Samson. Mais Sabatier. Pierre Alphonse Sabatier est l'un des quatre frères qui font parler d'eux à cette époque sur nos rives. A Heurteauville, Yainville, au Trait. Nous allons suivre leurs frasques. Maos gardons un œil sur la carrière du Trait.
Le 25 mars 1869, c'est Bénard, adjoint, "faisant fonction de maire du Trait", qui alerte le sénateur-préfet.

Vue de la Savonnerie, années 50. On devine ici des pans de la falaise exploitée par Sabatier
L'ingénieur ordinaire des mines reprend l'historique déjà établi en 1866. Puis ajoute à propos de la sente: "Elle ne sert, paraît-il, que lorsque les grandes marées viennent couvrir les vergers qui se trouvent être assez bas dans cette partie de la rive."
Un nouveau tracé
"Il est probable qu'un accord interviendra entre la commune du Trait et les exploitants pour faire établir d'une manière définitive la sente dans les vergers moyennant une surélévation du sol de ces vergers, dans les points bas, facile à établir avec les vidanges provenant de l'exploitation ; déjà il en a été question. Au besoin, le service des Ponts & Chaussées qui utilise le bloc de ces carrières provoquerait une pareille solution. Mais pour le moment, la sente existe et doit être respectée.
"Les travaux se sont approchés déjà sur deux point jusqu'à 2 et 3 mètres de la partie de sente qui nous occupe ; ils ne paraissent pas devoir être continués sur ces deux points et le réglement n'interdisait pas cette proximité de la voie publique puisqu'il ne s'agit pas d'un chemin à voiture et que dès lors la sente n'est pas protégée par les prescriptions de l'article 10."
Un certain danger
"Nous pensons qu'en raison de la solidité de la falaise, une largeur réservée de 2 mètres défendrait convenablement la sente contre le danger d'éboulement ; mais nous croyons qu'il ne serait pas prudent de réduire la largeur au dessous de ce chiffre. D'un autre côté, la partie non attaquée de la côte est couverte presque sur tous les points d'arbres et de broussailles qui en garantissent convenablement l'abord, il reste cependant quelques points pour lesquels il n'en est pas ainsi et un certain danger peut en résulter pour la circulation, une clôture bien entretenue remédierait à cet état de chose ; déjà, il en a été établi sur une petite partie de la longueur.'
Le 5 juillet 1869, le sénateur-préfet arrête que les travaux ne pourront être poursuivis qu'à deux mètres au moins du tracé de la sente. "L'abord du côté de la dite sente devra être garanti par une palissade en bois, une haie vive ou tout autre moyen de clôture."
Le 11 juillet, le garde-champêtre du Trait remet à Eloïse Duparc, l'épouse d'Alphonse Sabatier, l'arrêté du préfet...
Maintenant les affaires continuent. le vendredi 9 juillet 69, à une heure après-midi, a lieu en préfectere l'adjudication de travaux en deux lots :
1er Lot. - Construction d'une digue sur la rive gauche de la Seine, entre la Mailleraye et Caudebec, et établissement d'un chemjn de halage dana la traverse da la Mailleraye, 404,917 fr. 76 c, non compris une somme a valoir de 30,052 fr. 24 c. pour dépenses imprévues.
2° Lot. - Fourniture et emploi da blocs d'enroehements pour lea grosses reparations des chenins de halage et des digues de la Basse-Seine entre Duclair et la Bouille, 199,700 fr, non
compris 29,300fr. pour imprévus.
Les deux lots vont sans rabais à deux frères Sabatier, celui du Trait, l'autre à Yainville, seuls soumissionnaires.
Le 28 octobre 1869, un ouvrier, Louis Piot. est grièvement blessé aux carrières Sabatier d'Yainville. Sur place, les frères Sabatier mènent une rude concurrence à Emile Silvestre.
Le 2 octobre 1872, Pierre-Alphonse Sabatier perdait sa femme au Trait. Il avait deux filles.
Descendante du premier maire d'Yainville, Rosalie Adélaïde Armantine Lesain, de Rouen, est une bien riche propriétaire. Le 18 février 1873, elle vend à Charles-Sosthène Sabatier une carrière ouverte à Yainville, mais aussi diverses pièces de terre. Le tout pour un peu plus de 5 ha.
Le 5 janvier 1874, Charles-Sosthène vend l'Alexandrine, navire de 45 à 50 tonneaux gréée en sloop, à Auguste-Edmond Sabatier, d'Heurteauville, de 45 à 50 tonnaux, construit à Yainville en 1866, moyennant 4.000 F.Il le vend avec d'autant plus de plaisir qu'il est séparé de sa femme... prénommé Alexandrine. Ce navire servira à la société Sabatier-Saint-Denis qui va bientôt se créer sur les coteaux d'Heurteauville.
Quant à Pauline Alexandrine Dossier, les Mainberte ont affaire alors à elle pour se loger car elle leur loue une belle ferme aux Fontaines. Celle-ci vend au sieur Lattelais, venu d'Odessa, en Russie, une ferme à Saint-Paër.
Charles Sosthène, de on côté, baille à son frère Auguste-Edmond, le 1er février, une ferme qu'il possède à Yainville : verger édifié et planté sur deux hectares, terre de labour et lisière en taillis sur deux autres, enfin un hectare en taillis, baliveaux et patis. Oui, ces gens-là ont inventé le Monopoly.
La preuve ? Le 9 mars 1874, Pierre-Alphonse Sabatier, du Trait, vend à Heurteauville une ferme à Jérémie Feuillye.
Condamné en 1874...
La mairie du Trait ne lâche pas prise. Le 27 octobre 1874, elle interpelle de nouveau le préfet pour lui signaler les excavations souterraines qui envahissent le sol de la sente. Le 5 décembre suivant, les ingénieurs n'accordent plus leur indulgence au carrier, devenu entre temps propriétaire des lieux. "Sabatier s'est emparé, sans aucune autorisation administrative d'occupation temporaire, du terrain d'autrui. Une pareille usurpation, faite au mépris des mises en demeure du maire, n'est pas tolérable et il y a lieu, pour la commune, de poursuivre l'envahisseur devant les tribunaux compétents pour faire respecter sa propriété et se faire attribuer une juste indemnité pour le dommage causé."
Devant le tribunal civil, Sabatier est condamné. Mais on le dit insolvable...
Avril 1874 : Pierre Sosthène Sabatier vend à Eugène Nicolas Cauvin, du Landin, la moitié indivis de six bateaux et du matériel.
Mars 1875 : Charles Sosthène Sabatier est momentanément à Londres. Sa femme, dont il est séparé, va quant à elle s'établir à Châlons-surMarne.
Le 13 juille, Bicheray, le vieux notaire de Jumièges, signa son dernier acte et céda sa place à Peschard. Dès le 14 juillet 1875, le premier acte du nouveau notaire est une main levée de Pierre Sosthène, toujours à Londres, en compagnie de Eugène Nicolas Cauvin, du Landin, à Emile Silvestre. Notre jeune notaire vient de mettre les pieds dans une fourmilière. Il en sera un jour victime. Un 14 juillet aussi...
En août 1875, Pierre Alphonse Sabatier baillait au Trait une ferme de 12 ha à Michel Vallois.
La vente de bateaux
Le mercredi 13 octobre 1875, on mit en vente six bateaux pontés amarrés à Yainville sur la propriété de Charles Sosthène Sabatier, toujours à Londres. L'un gréé en sloop de 45 tonnaux, les autres gréés en gribane de 24, 31, 33 et 37 tonneaux. La vente eut lieu en l'étude de Me Peschard, notaire à Jumièges, à une heure de l'après-midi.
Ce sont finalement cinq bateaux qui furent adjugés à Nicolas Eugène Cauvin, du Landin, déjà propriétaire pour moitié. Ils s'appellent Charles-Alexandre, Charlotte, Vigilant, Louis-Marie et Petite-Marie. Le tout part pour 10.300F. C'est manifestement le sloop Alexandrine qui a été soustrait de la vente annoncée.
Le même jour, sur la propriété, on vendait du matériel de carrier et de charpentier de navire. Sur les lieux, il fallut s'adresser à Auguste Sabatier, M. Cauvin, propriétaire au Landin ou au dit Peschard.
En novembre 1875, Pierre Alphonse Sabatier, du Trait, baille à Eugène Alphonse Desabayes (sic), d'Hénouville, une ferme de 15 ha à cheval sur Le Trait et Yainville consistant en verger édifié, terres de labour et prairies artificielles.
Le 26 décembre, il vend un terre en labour au Mesnil à Séraphin Honoré Duparc.
16 novembre 1876. Pierre-Alphonse Sabatier baille cette fois à un Traiton, Amand Charles Pompon (re-sic) un jardin anglais, avec pavillon, bâtiments situés au Trait. Le même jour, il vend deux fermes à Louis-François Leroy composées de cours-masures édifiées, closes et plantées, l'une au Trait nommée la Bucaille, l'autre à Yainville, la Haute-Ville. Le tout contient 29 ha avec terres en labour, prairies artificielles, bois taillis. Montant : 57.500 F.
En février 1877, c'est une prairie sise à Heurteauville qu'il vend à Auguste-Joseph Boullard, de Duclair.
Pendant ce temps, Charles Sosthène Sabatier était toujours à Londres et son mandataire ne manquait pas de gérer scrupuleusement ses affaires. C'est ainsi que, le 24 mai 1878, il il vendit à Poullain Grandchamps 3 ha de terres en labour et taillis sur Yainville. Le 9 juillet suivant, l'homme d'affaires traitait avec Jean Baptiste Théodore Ouin en lui vendant à réméré 2 hectares de verger édifié, clos et planté sur Yainville avec carrières, s'il-vous-plait, coteaux, friches et terres de labour. Et avec cela ? Vous me mettrez deux prairies à Heurteauville. Une transaction trop complexe du reste pour le simple d'esprit que je suis. (2 E 71/292 P. 181)
Le 10 septembre 1877, les filles de Pierre Alphonse Sabatier demandent la vente des biens issus de la succession de leurs grands-parents, Charles Jules Duparc et de sa femme, Rose Elisabeth Faine, morts tous deux aux Mesnil. Les demanderesses sont Laurentine Alphonsine, alors à Lisieux, et Héloïse Elisabeth, mineure toujours sous la tutelle légale de son père. (2 E 71/292 P. 186)
En novembre, Pierre Alphonse vend une terre de labour au Mesnil à Sosthène Honoré Duparc.
Nouvelle plainte en 1878
Puis, au Trait, Pierre-Alphonse Sabatier reprend l'exploitation de sa carrière par l'abattage des piliers des excavations souterraines. Un puits se dessine même sous la sente. Alors, le 22 avril 1878, Boquet, adjoint faisant fonction de maire du Trait, revient à la charge. Tout en ordonnant à Sabatier d'établir "un barrage sérieux" en attendant la visite des Ponts & Chaussées.
L'ingénieur ordinaire: "Les éboulements ont gagné et ne sont en certains points qu'à 0,30 m du bord de la sente. Il est évident qu'un pareil travail menace immédiatement la conservation de cette sente et par suite la sûreté publique en raison de la circulation qui a lieu sur cette sente..."
L'arrêté du préfet intervient le 15 juillet:
A cette époque, Pierre-Alphonse n'a manifestement pas donné son accord au mariage de Laurentine, sa fille, demeurant à Rouen. Elle doit signer des actes respectueux chez le notaire de Jumièges.
En juin 1878, Pierre-Auguste Sabatier, dit "propriétaire et entrepreneur de travaux publics", vendit encore plusieurs biens au Trait :
1) Une cour masure triage du Poirier-Masson, au Trait, à Michel Bénet, boulanger de Duclair.
2) Une pièce de terre au Trait à Louis-Isidore Leroy, rentier du Trait.
3) Une pièce de terre en labour et lisière en taillis sise à Yainville à Dominique Théodore Hébert et sa femme Antoinette Marie Tanquerel, débitants au Trait.
4) Une pièce de terre à Yainville à Louis Eugène Sieurin, cultivateur au Trait.
En octobre 1878, Héloïse, la fille mineure de Pierre-Alphonse, acceptait de lui une cour masure au Trait de 53 ares. Son subrogé-tuteur était François Placide Thuillier, du Mesnil.
7 juin 1879, c'est l'inventaire après décès du patriarche, Antoine Sabatier. Il avait eu quatre garçons et une fille. Les héritiers se répartissent comme suit :
- Antoine Sabatier, l'aîné est décédé. Il fut carrier à Heurteauville de son vivant. Deux fils de celui-ci héritent : Auguste-Antoine Sabatier du Landin, Louis Aimable Sabatier, de Rouen puis de Landrecies dans le Nord, né à Jumièges en 1858, section d'Heurteauville. Mais aussi Rose Hélène Fauvel, veuve d'Antoine Sabatier, du Landin, tutrice de Marie Esmeralda Sabatier, sa fille mineure.
Pierre Alphonse Sabatier, du Trait est toujours en vie. Il a aussi deux filles qui héritent : Héloïse Alphonsine, femme de Edouard Cavelier, de Routot et Alexandrine Héloïse Sabatier, femme de Gustave Théodore Savalle, du Landin. Sinon, il lui reste une fille mineure, Héloïse Elisabeth.
Charles Sosthène Sabatier, de Londres, habituellement à Yainville, séparé d'Alexandrine Dossier. On ne voit pas leur fils, Charles Alexandre, hériter. Celui-est localisé à Beauvais en 1887 tandis que sa mère, dévorcée, est à Jumièges.
Auguste Edmond Sabatier, de Yainville. En 1911, on le retrouvera délégué sénatorial suppléant pour la commune du Trait.
Le patriarche avait eu aussi une fille,
Vitalie Sabatier, épouse Louis Victorin Varin à Jumièges en 1854. Elle est décédée en 1858 à Saint-Arnoult, laissant une fille : Vitalie Elisabeth Varin, femme de Joseph Sulpice Dubos, de Saint-Ouen-le-Mauger, hériter.
11 août 79 : Pauline Alexandrine Dossier vend 1 ha de terres à Poullain Grandchamp sur Yainville.
Nous avons connu la carrière du Trait sous le nom de Samson. La famille compte des héritiers de Alfred Théodore et Arthur Charles Samson, décédés à Rouen et Eugène Maxime Samson, décédé à Toulon. Ces héritiers, ce sont Pierre-Alphonse Sabatier, du Trait, Pierre-THéodore Samson, de Villequier, Henriette Florestine Samson, épouse de François Isidor Beuriot, de Caudebec, Alfred Emmanuel Arthur Samson, mineur, de Bois-Guillaume, sous la tutelle de Thérèse Louise Lessertisseur, sa mère, veuve de Arthur Charles Samson. Tous vendent des immeubles leur appartenant en indivision au Trait et à Yainville en 1881.
En juillet 1881, de Yainville, Héloïse Elisabeth Sabatier, la fille mineure de Sabatier, adresse deux actes respectueux à son père qui finit par consentir au mariage d'Héloïse Elisabeth avec Jean-Baptiste Margerie du Trait.
Le même mois, à Yainville Auguste-Edmond Sabatier vend des bateaux à réméré à Léon Joseph Roussel, de Duclair moyennant 4.000F. Le même Roussel revendra un bateau en mai 1888 à Charles Julien Levaillant, de Jumièges.

La flottille Sabatier
La Petite Maria. Constuit en 1863, La Mailleraye, 20 tonneaux. Elle appartint successivement à Brière, entrepreneur à Caudebec, Sostène Sabatier, alors à Yainville, Cauvin, du Landin et enfin Silvestre. Navigue d'abord au bornage. Deconihout était patron en 1865, Beuriot à partir de 66. Navigation intérieure à partir de 1872. On le voit naviguer jusqu'en 1881.
Le Virgile. Sloop construit en 1857 à Saint-Valery-en-Caux. 56 tonneaux. En 1887, l'équipage est breton et commandé par Yves Gérard, de Plouézec. Navigue jusqu'à Brest. Il est commandé en 1889 par Auguste Sabatier avec à bord Taillandier, Michel Cotty de Plouézoc'h, Louis Gautier, Pierre Simon de Plouénan, Ernest Tranquille Mauger, autre patron et son frère Louis, matelot.
Il est commandé en janvier 1890 par Ernest Tranquille Mauger. Matelots : Louis Albert Sénateur Mauger, son frère, Hippolite Chouquet, Eugène Hardel, Henri Paysant. 1881 7P6_159 p 130.
Ensuite par Louis Denonihout, né en 1866 à Jumièges. Le matelot est son père, Louis, né en 1831.
Georges et Valentine, chalan de 18 tonneaux pour Pierre-Auguste Sabatier contruit en 1881 à Yainville.
Le SH. Auguste Sabatier commandait en 1889 le SH (Service hydrographique de la Marine), construit cette année-là à Duclair du port de 15 tx. Il appartient aux Pont & Chaussées.
Recherche et numérisation aux archives départementales : Jean-Yves et Josiane Marchand, Cotes: 3S115, 8S45.
Journal de Rouen.
La plainte du lieutenant
Le 28 février 1866, le sieur Leroy porte plainte auprès du sénateur-préfet. Leroy est lieutenant des Douanes retraité, demeurant à Caudebec, mais possédant une ferme au Trait, en haut d'un falaise où passe encore l'ancienne sente allant à Jumièges.
Au pied de la paroi, un certain Samson est propriétaire d'une carrière à ciel ouvert. Et il creuse, Samson, il creuse tant que Leroy crie au danger. Au danger et à la spoliation !
"Le dit Samson n'a d'autres buts que de s'emparer du chemin et des propriétés voisines au moyen des éboulements qui, nécessairement, devront s'ensuivre et qui verseront dans sa masure, au pied des rochers, les terres arables des particuliers, objets de sa convoitise.
Le silence des maires
"Le coupable silence des maires du Trait et d'Yainville en cette désastreuse circonstance est inqualifiable, il a ajouté à la hardiesse de l'anticipateur.
"C'est pourquoi, Monsieur le Préfet, j'ai cru devoir en cette occasion appeler votre justice et votre bienveillante sollicitude à la vue d'un péril aussi grave compromettant à la fois la sûreté publique et les intérêts des propriétaires voisins...
Le 21 mars, l'ingénieur ordinaire des mines se rend sur place. Il nous livre dans son rapport un intéressant historique.
Plusieurs chantiers
"La partie de la rive droite de la Seine comprise entre le village du Trait et le hameau de Claquevent, dépendant de la commune d'Yainville, sur une longueur d'environ 1500 mètres, est formée d'une étroite bande d'alluvion longeant le pied d'une falaise plus ou moins abrupte. Cette bande étroite est couverte de masures. La falaise a été sur presque tous ses points attaquée par des extractions de blocs calcaires. Ces exploitations, qui avaient l'avantage d'élargir l'emplacement des vergers, donnaient du bloc de bonne qualité qui a été employé en quantité considérable dans les travaux d'endiguement exécutés dans la partie voisine de la Seine.
"Actuellement encore, un certain nombre de chantiers sont en activité et les entrepreneurs des travaux de la Seine les exploitent, soit en raison d'arrangements avec les propriétaires, soit sous le couvert de décisions administratives.
"Le sieur Samson, sur les carrières duquel le sieur Leroy, plaignant, appelle l'attention, est propriétaire d'une partie du terrain que nous venons de décrire, sur 380m environ de longueur, à cheval sur les deux communes de Yainville et du Trait. La portion de falaise qui lui appartient a été naturellement, comme celles de ses voisins, le siège des extractions de blocs.
L'antique sente
"Une sente, à l'usage des piétons, dite de Jumièges au Trait, suivait autrefois le bord de la falaise, depuis son origine jusqu'au Trait. Cette sente, d'un parcours assez incommode, à cause des ondulations et des gorges plus ou moins profondes qui découpaient la falaise, à d'abord été refoulées sur plusieurs points par les travaux des carrières dans les parties les plus voisines du village d'Yainville. Enfin, dans cette région, elle a fini par quitter la falaise et s'établir dans les masures mêmes qui en bordent le pied.
"Il n'en est pas encore ainsi dans la partie la plus voisine du Trait et en particulier au droit de la propriété Samson. Et bien que la circulation se fasse presque entièrement par les masures, la sente règne encore sur le front de la falaise et plusieurs rampes montant obliquement permettent d'y accéder du terrain inférieur.
"Mais cette voie est si peu fréquentée que les labours l'ont peu à peu envahie et réduite presque à rien, notamment sur un terrain appartenant au plaignant.
"Dans cette partie de la sente, les travaux des carrières s'en approchent à une distance variable qui atteint un minimum de 3 m pour une hauteur de front de taille de 10 à 12 m, en quelques points de la propriété Samson. Mais cette proximité ne nous semble présenter aucun danger. D'une part la falaise est très solide, de l'autre la crête de la côte est couverte, sur toute sa longueur, d'une bordure de bois et de buissons qui en défendent l'abord d'une manière très complète.
Détail d'une carte postale. A gauche: l'église du Trait.
Sur la rive: des propriétés. Ou se trouvait celle du Sieur Sabatier ?
"Les travaux sont abandonnés dans la partie de carrière où le front d'attaque est à la distance minimum de la sente et ils n'ont lieu actuellement que dans une partie assez éloignée de la sente, à la même distance d'ailleurs qu'une exploitation ouverte sur le terrain voisin, appartenant à M. Leroy, plaignant.
"M. Samson nous a déclaré qu'en laissant exploiter son terrain par les entrepreneurs de la Seine, il avait toujours entendu que les limites de sa propriété ne seraient pas dépassées et que c'était par son ordre que l'exploitation avait été abandonnée dans les parties les plus avancées. Qu'il avait jusqu'à ce jour d'ailleurs exercé une surveillance personnelle constante et qu'il continuerait à surveiller de même.
"De ce qui précède, il nous paraît résulter que les craintes du sieur Leroy n'ont pas de fondement et nous croyons qu'il n'y a pas lieu de donner suite à sa plainte.
Le rapport est daté du 4 avril 1866. Il est approuvé le 9 par l'ingénieur en chef.
Rebondissement en 1869
Trois ans plus tard, on ne dit plus carrière Samson. Mais Sabatier. Pierre Alphonse Sabatier est l'un des quatre frères qui font parler d'eux à cette époque sur nos rives. A Heurteauville, Yainville, au Trait. Nous allons suivre leurs frasques. Maos gardons un œil sur la carrière du Trait.
Le 25 mars 1869, c'est Bénard, adjoint, "faisant fonction de maire du Trait", qui alerte le sénateur-préfet.
"M.
Sabatier, ex-entrepreneur des travaux de la Basse-Seine, vient
d'ouvrir, sur le territoire de la commune du Trait, une
carrière à ciel ouvert pour l'extraction du bloc
qu'il vend pour la construction des digues et ce, le long d'un chemin
de deux mètres de largeur qui va du Trait à
Yainville et dont la plus grande largeur, du haut de la
carrière au chemin, n'a pas cinq mètres, ce qui
peut devenir, pour les personnes qui fréquentent ce chemin,
un danger et que quand les eaux son hautes, la douane ne peut se servir
que de ce chemin. Ayant cru qu'il était de mon devoir de faire cesser le travail sur ce point, le garde-champêtre a averti M. Sabatier de cesser, il a répondu qu'il continuerait les travaux. C'est pourquoi je crois vous avertir de ce fait afin que vous ayez la bonté de donner l'ordre à ce que ce travail cesse le plus tôt possible dans la crainte de graves accidents. |
Les frères
Sabatier
Antoine,
né à Bourg-Achard en 1825. Il épouse
en 1846
à Jumièges Rose Hélène
Fauvel, fille de
cultivateurs. Ils eurent deux fils en 1856, Antoine-Auguste, qui sera
vannier et Louis ainsi qu'une filleFils d'Antoine et Louise Deshayes, cabaretiers Le patriarche fut ensuite conducteur de travaux publics Second maire d'Heurteauville (1871-1876). Pierre-Alphonse, né à Bourg-Achard en 1827. Marié en 1853 au Mesnil avec Eloïse Elisabeth Duparc. Il est alors dit contremaître chez son père. Il sera arpenteur de travaux publics, puis propriétaire au Trait. Il y exploite des carrières. Deux filles. Charles-Sosthène, né à Bourg-Achard en 1829. En 1854, à Saint-Paër, il épouse Alexandrine Dossier. En 1858, Charles Sosthène était marin à Yainville. Puis propriétaire. Il eut un fils, Charles Alexandre, diplômé des Arts et Métiers et de l'école centrale de Paris. En 1881, la femme de Sosthène demande le divorce. Il est alors dit employé de commerce sans domicile connu. Concurrent des Sabatier, le carrier Emile Silvestre, maire d'Yainville, fit la transcription sur le registre d'état-civil. On le voit séjourner ensuite à Londres. Auguste Edmond. né en 1841 section d'Heurteauville où il sera associé avec Saint-Denis pour exploitier la tourbe et les jardins en espaliers. En 1874, il est pour deux ans le locataire de son frère Sosthène dans sa ferme de Yainville. Directeur de travaux en 1881. |

Vue de la Savonnerie, années 50. On devine ici des pans de la falaise exploitée par Sabatier
L'ingénieur ordinaire des mines reprend l'historique déjà établi en 1866. Puis ajoute à propos de la sente: "Elle ne sert, paraît-il, que lorsque les grandes marées viennent couvrir les vergers qui se trouvent être assez bas dans cette partie de la rive."
Un nouveau tracé
"Il est probable qu'un accord interviendra entre la commune du Trait et les exploitants pour faire établir d'une manière définitive la sente dans les vergers moyennant une surélévation du sol de ces vergers, dans les points bas, facile à établir avec les vidanges provenant de l'exploitation ; déjà il en a été question. Au besoin, le service des Ponts & Chaussées qui utilise le bloc de ces carrières provoquerait une pareille solution. Mais pour le moment, la sente existe et doit être respectée.
"Les travaux se sont approchés déjà sur deux point jusqu'à 2 et 3 mètres de la partie de sente qui nous occupe ; ils ne paraissent pas devoir être continués sur ces deux points et le réglement n'interdisait pas cette proximité de la voie publique puisqu'il ne s'agit pas d'un chemin à voiture et que dès lors la sente n'est pas protégée par les prescriptions de l'article 10."
Un certain danger
"Nous pensons qu'en raison de la solidité de la falaise, une largeur réservée de 2 mètres défendrait convenablement la sente contre le danger d'éboulement ; mais nous croyons qu'il ne serait pas prudent de réduire la largeur au dessous de ce chiffre. D'un autre côté, la partie non attaquée de la côte est couverte presque sur tous les points d'arbres et de broussailles qui en garantissent convenablement l'abord, il reste cependant quelques points pour lesquels il n'en est pas ainsi et un certain danger peut en résulter pour la circulation, une clôture bien entretenue remédierait à cet état de chose ; déjà, il en a été établi sur une petite partie de la longueur.'
Le 5 juillet 1869, le sénateur-préfet arrête que les travaux ne pourront être poursuivis qu'à deux mètres au moins du tracé de la sente. "L'abord du côté de la dite sente devra être garanti par une palissade en bois, une haie vive ou tout autre moyen de clôture."
Le 11 juillet, le garde-champêtre du Trait remet à Eloïse Duparc, l'épouse d'Alphonse Sabatier, l'arrêté du préfet...
Maintenant les affaires continuent. le vendredi 9 juillet 69, à une heure après-midi, a lieu en préfectere l'adjudication de travaux en deux lots :
1er Lot. - Construction d'une digue sur la rive gauche de la Seine, entre la Mailleraye et Caudebec, et établissement d'un chemjn de halage dana la traverse da la Mailleraye, 404,917 fr. 76 c, non compris une somme a valoir de 30,052 fr. 24 c. pour dépenses imprévues.
2° Lot. - Fourniture et emploi da blocs d'enroehements pour lea grosses reparations des chenins de halage et des digues de la Basse-Seine entre Duclair et la Bouille, 199,700 fr, non
compris 29,300fr. pour imprévus.
Les deux lots vont sans rabais à deux frères Sabatier, celui du Trait, l'autre à Yainville, seuls soumissionnaires.
Le 28 octobre 1869, un ouvrier, Louis Piot. est grièvement blessé aux carrières Sabatier d'Yainville. Sur place, les frères Sabatier mènent une rude concurrence à Emile Silvestre.
Le 2 octobre 1872, Pierre-Alphonse Sabatier perdait sa femme au Trait. Il avait deux filles.
Descendante du premier maire d'Yainville, Rosalie Adélaïde Armantine Lesain, de Rouen, est une bien riche propriétaire. Le 18 février 1873, elle vend à Charles-Sosthène Sabatier une carrière ouverte à Yainville, mais aussi diverses pièces de terre. Le tout pour un peu plus de 5 ha.
Le 5 janvier 1874, Charles-Sosthène vend l'Alexandrine, navire de 45 à 50 tonneaux gréée en sloop, à Auguste-Edmond Sabatier, d'Heurteauville, de 45 à 50 tonnaux, construit à Yainville en 1866, moyennant 4.000 F.Il le vend avec d'autant plus de plaisir qu'il est séparé de sa femme... prénommé Alexandrine. Ce navire servira à la société Sabatier-Saint-Denis qui va bientôt se créer sur les coteaux d'Heurteauville.

Quant à Pauline Alexandrine Dossier, les Mainberte ont affaire alors à elle pour se loger car elle leur loue une belle ferme aux Fontaines. Celle-ci vend au sieur Lattelais, venu d'Odessa, en Russie, une ferme à Saint-Paër.
Charles Sosthène, de on côté, baille à son frère Auguste-Edmond, le 1er février, une ferme qu'il possède à Yainville : verger édifié et planté sur deux hectares, terre de labour et lisière en taillis sur deux autres, enfin un hectare en taillis, baliveaux et patis. Oui, ces gens-là ont inventé le Monopoly.
La preuve ? Le 9 mars 1874, Pierre-Alphonse Sabatier, du Trait, vend à Heurteauville une ferme à Jérémie Feuillye.
Condamné en 1874...
La mairie du Trait ne lâche pas prise. Le 27 octobre 1874, elle interpelle de nouveau le préfet pour lui signaler les excavations souterraines qui envahissent le sol de la sente. Le 5 décembre suivant, les ingénieurs n'accordent plus leur indulgence au carrier, devenu entre temps propriétaire des lieux. "Sabatier s'est emparé, sans aucune autorisation administrative d'occupation temporaire, du terrain d'autrui. Une pareille usurpation, faite au mépris des mises en demeure du maire, n'est pas tolérable et il y a lieu, pour la commune, de poursuivre l'envahisseur devant les tribunaux compétents pour faire respecter sa propriété et se faire attribuer une juste indemnité pour le dommage causé."
Devant le tribunal civil, Sabatier est condamné. Mais on le dit insolvable...
Avril 1874 : Pierre Sosthène Sabatier vend à Eugène Nicolas Cauvin, du Landin, la moitié indivis de six bateaux et du matériel.
Mars 1875 : Charles Sosthène Sabatier est momentanément à Londres. Sa femme, dont il est séparé, va quant à elle s'établir à Châlons-surMarne.
Le 13 juille, Bicheray, le vieux notaire de Jumièges, signa son dernier acte et céda sa place à Peschard. Dès le 14 juillet 1875, le premier acte du nouveau notaire est une main levée de Pierre Sosthène, toujours à Londres, en compagnie de Eugène Nicolas Cauvin, du Landin, à Emile Silvestre. Notre jeune notaire vient de mettre les pieds dans une fourmilière. Il en sera un jour victime. Un 14 juillet aussi...
En août 1875, Pierre Alphonse Sabatier baillait au Trait une ferme de 12 ha à Michel Vallois.
La vente de bateaux
Le mercredi 13 octobre 1875, on mit en vente six bateaux pontés amarrés à Yainville sur la propriété de Charles Sosthène Sabatier, toujours à Londres. L'un gréé en sloop de 45 tonnaux, les autres gréés en gribane de 24, 31, 33 et 37 tonneaux. La vente eut lieu en l'étude de Me Peschard, notaire à Jumièges, à une heure de l'après-midi.
Ce sont finalement cinq bateaux qui furent adjugés à Nicolas Eugène Cauvin, du Landin, déjà propriétaire pour moitié. Ils s'appellent Charles-Alexandre, Charlotte, Vigilant, Louis-Marie et Petite-Marie. Le tout part pour 10.300F. C'est manifestement le sloop Alexandrine qui a été soustrait de la vente annoncée.
Le même jour, sur la propriété, on vendait du matériel de carrier et de charpentier de navire. Sur les lieux, il fallut s'adresser à Auguste Sabatier, M. Cauvin, propriétaire au Landin ou au dit Peschard.
En novembre 1875, Pierre Alphonse Sabatier, du Trait, baille à Eugène Alphonse Desabayes (sic), d'Hénouville, une ferme de 15 ha à cheval sur Le Trait et Yainville consistant en verger édifié, terres de labour et prairies artificielles.
Le 26 décembre, il vend un terre en labour au Mesnil à Séraphin Honoré Duparc.
16 novembre 1876. Pierre-Alphonse Sabatier baille cette fois à un Traiton, Amand Charles Pompon (re-sic) un jardin anglais, avec pavillon, bâtiments situés au Trait. Le même jour, il vend deux fermes à Louis-François Leroy composées de cours-masures édifiées, closes et plantées, l'une au Trait nommée la Bucaille, l'autre à Yainville, la Haute-Ville. Le tout contient 29 ha avec terres en labour, prairies artificielles, bois taillis. Montant : 57.500 F.
En février 1877, c'est une prairie sise à Heurteauville qu'il vend à Auguste-Joseph Boullard, de Duclair.
Pendant ce temps, Charles Sosthène Sabatier était toujours à Londres et son mandataire ne manquait pas de gérer scrupuleusement ses affaires. C'est ainsi que, le 24 mai 1878, il il vendit à Poullain Grandchamps 3 ha de terres en labour et taillis sur Yainville. Le 9 juillet suivant, l'homme d'affaires traitait avec Jean Baptiste Théodore Ouin en lui vendant à réméré 2 hectares de verger édifié, clos et planté sur Yainville avec carrières, s'il-vous-plait, coteaux, friches et terres de labour. Et avec cela ? Vous me mettrez deux prairies à Heurteauville. Une transaction trop complexe du reste pour le simple d'esprit que je suis. (2 E 71/292 P. 181)
Le 10 septembre 1877, les filles de Pierre Alphonse Sabatier demandent la vente des biens issus de la succession de leurs grands-parents, Charles Jules Duparc et de sa femme, Rose Elisabeth Faine, morts tous deux aux Mesnil. Les demanderesses sont Laurentine Alphonsine, alors à Lisieux, et Héloïse Elisabeth, mineure toujours sous la tutelle légale de son père. (2 E 71/292 P. 186)
En novembre, Pierre Alphonse vend une terre de labour au Mesnil à Sosthène Honoré Duparc.
Nouvelle plainte en 1878
Puis, au Trait, Pierre-Alphonse Sabatier reprend l'exploitation de sa carrière par l'abattage des piliers des excavations souterraines. Un puits se dessine même sous la sente. Alors, le 22 avril 1878, Boquet, adjoint faisant fonction de maire du Trait, revient à la charge. Tout en ordonnant à Sabatier d'établir "un barrage sérieux" en attendant la visite des Ponts & Chaussées.
L'ingénieur ordinaire: "Les éboulements ont gagné et ne sont en certains points qu'à 0,30 m du bord de la sente. Il est évident qu'un pareil travail menace immédiatement la conservation de cette sente et par suite la sûreté publique en raison de la circulation qui a lieu sur cette sente..."
L'arrêté du préfet intervient le 15 juillet:
"Considérant
que le bloc calcaire est
exploité par éboulement dans la dite
carrière, que ces éboulements ont
été poussés jusqu'au bord de la sente
et menacent la conservation de cette sente et par suite la
sûreté publique arrête : Article
1
Tout
nouveau travail d'extraction de bloc calcaire est interdit dans la
carrière ouverte sur la propriété du
sieur Sabatier, le long de la sente communale du Trait
à Yainville.Article
2
Il
devra être établi au bord de l'excavation une
clôture solide et continue de 1 mètre au moins de
hauteur qui devra être constamment entretenue en bon
état. |
A cette époque, Pierre-Alphonse n'a manifestement pas donné son accord au mariage de Laurentine, sa fille, demeurant à Rouen. Elle doit signer des actes respectueux chez le notaire de Jumièges.
En juin 1878, Pierre-Auguste Sabatier, dit "propriétaire et entrepreneur de travaux publics", vendit encore plusieurs biens au Trait :
1) Une cour masure triage du Poirier-Masson, au Trait, à Michel Bénet, boulanger de Duclair.
2) Une pièce de terre au Trait à Louis-Isidore Leroy, rentier du Trait.
3) Une pièce de terre en labour et lisière en taillis sise à Yainville à Dominique Théodore Hébert et sa femme Antoinette Marie Tanquerel, débitants au Trait.
4) Une pièce de terre à Yainville à Louis Eugène Sieurin, cultivateur au Trait.
En octobre 1878, Héloïse, la fille mineure de Pierre-Alphonse, acceptait de lui une cour masure au Trait de 53 ares. Son subrogé-tuteur était François Placide Thuillier, du Mesnil.
7 juin 1879, c'est l'inventaire après décès du patriarche, Antoine Sabatier. Il avait eu quatre garçons et une fille. Les héritiers se répartissent comme suit :
- Antoine Sabatier, l'aîné est décédé. Il fut carrier à Heurteauville de son vivant. Deux fils de celui-ci héritent : Auguste-Antoine Sabatier du Landin, Louis Aimable Sabatier, de Rouen puis de Landrecies dans le Nord, né à Jumièges en 1858, section d'Heurteauville. Mais aussi Rose Hélène Fauvel, veuve d'Antoine Sabatier, du Landin, tutrice de Marie Esmeralda Sabatier, sa fille mineure.
Pierre Alphonse Sabatier, du Trait est toujours en vie. Il a aussi deux filles qui héritent : Héloïse Alphonsine, femme de Edouard Cavelier, de Routot et Alexandrine Héloïse Sabatier, femme de Gustave Théodore Savalle, du Landin. Sinon, il lui reste une fille mineure, Héloïse Elisabeth.
Charles Sosthène Sabatier, de Londres, habituellement à Yainville, séparé d'Alexandrine Dossier. On ne voit pas leur fils, Charles Alexandre, hériter. Celui-est localisé à Beauvais en 1887 tandis que sa mère, dévorcée, est à Jumièges.
Auguste Edmond Sabatier, de Yainville. En 1911, on le retrouvera délégué sénatorial suppléant pour la commune du Trait.
Le patriarche avait eu aussi une fille,
Vitalie Sabatier, épouse Louis Victorin Varin à Jumièges en 1854. Elle est décédée en 1858 à Saint-Arnoult, laissant une fille : Vitalie Elisabeth Varin, femme de Joseph Sulpice Dubos, de Saint-Ouen-le-Mauger, hériter.
11 août 79 : Pauline Alexandrine Dossier vend 1 ha de terres à Poullain Grandchamp sur Yainville.
Nous avons connu la carrière du Trait sous le nom de Samson. La famille compte des héritiers de Alfred Théodore et Arthur Charles Samson, décédés à Rouen et Eugène Maxime Samson, décédé à Toulon. Ces héritiers, ce sont Pierre-Alphonse Sabatier, du Trait, Pierre-THéodore Samson, de Villequier, Henriette Florestine Samson, épouse de François Isidor Beuriot, de Caudebec, Alfred Emmanuel Arthur Samson, mineur, de Bois-Guillaume, sous la tutelle de Thérèse Louise Lessertisseur, sa mère, veuve de Arthur Charles Samson. Tous vendent des immeubles leur appartenant en indivision au Trait et à Yainville en 1881.
En juillet 1881, de Yainville, Héloïse Elisabeth Sabatier, la fille mineure de Sabatier, adresse deux actes respectueux à son père qui finit par consentir au mariage d'Héloïse Elisabeth avec Jean-Baptiste Margerie du Trait.
Le même mois, à Yainville Auguste-Edmond Sabatier vend des bateaux à réméré à Léon Joseph Roussel, de Duclair moyennant 4.000F. Le même Roussel revendra un bateau en mai 1888 à Charles Julien Levaillant, de Jumièges.

Auguste-Emond Sabatier. (1841-1921).
Sa petite fille, Raymonde Déhais, épouse Méhu, sera la secrétaire de Direction des ACSM.
Sa petite fille, Raymonde Déhais, épouse Méhu, sera la secrétaire de Direction des ACSM.
La flottille Sabatier
L'Albert. Construit en 1870 à La Mailleraye pour le compte d'Auguste Sabatier, du port de 28 tonneaux, il fut racheté par Silvestre en 1888. Revendu à Guilbert en 1896 par la veuve Silvestre. Naviguait encore en 1902 avant d'être démoli.
L'Alexandrine. On a vu un navire de ce nom construit en 1866 à Yainville et vendu en 74 par Sosthène Sabatier à Auguste-Edmond, d'Heurteauville. On en cite un autre construit en 1871 à La Mailleraye du port de 19 tonneaux pour le compte de Saint-Denis, à Heurteauville. En 1880, navigue au bornage avec Sabatier pour patron. Vendu à Silvestre, à Elbeuf, le 20 décembre 1881. Il aura Agrest pour patron. Revendu à Guilbert en 1897.
Le Charles-Alexandre, Sloop de 19 tonneaux constuit en 1860 à La Mailleraye, appartenant d'abord à Sostène Sabatier, de Yainville, vendu en 1876 à Cauvin, du Landin et en 1877 à Silvestre.La Petite Maria. Constuit en 1863, La Mailleraye, 20 tonneaux. Elle appartint successivement à Brière, entrepreneur à Caudebec, Sostène Sabatier, alors à Yainville, Cauvin, du Landin et enfin Silvestre. Navigue d'abord au bornage. Deconihout était patron en 1865, Beuriot à partir de 66. Navigation intérieure à partir de 1872. On le voit naviguer jusqu'en 1881.
Le Virgile. Sloop construit en 1857 à Saint-Valery-en-Caux. 56 tonneaux. En 1887, l'équipage est breton et commandé par Yves Gérard, de Plouézec. Navigue jusqu'à Brest. Il est commandé en 1889 par Auguste Sabatier avec à bord Taillandier, Michel Cotty de Plouézoc'h, Louis Gautier, Pierre Simon de Plouénan, Ernest Tranquille Mauger, autre patron et son frère Louis, matelot.
Il est commandé en janvier 1890 par Ernest Tranquille Mauger. Matelots : Louis Albert Sénateur Mauger, son frère, Hippolite Chouquet, Eugène Hardel, Henri Paysant. 1881 7P6_159 p 130.
Ensuite par Louis Denonihout, né en 1866 à Jumièges. Le matelot est son père, Louis, né en 1831.
Georges et Valentine, chalan de 18 tonneaux pour Pierre-Auguste Sabatier contruit en 1881 à Yainville.
Le SH. Auguste Sabatier commandait en 1889 le SH (Service hydrographique de la Marine), construit cette année-là à Duclair du port de 15 tx. Il appartient aux Pont & Chaussées.
Laurent QUEVILLY.
Sources
Recherche et numérisation aux archives départementales : Jean-Yves et Josiane Marchand, Cotes: 3S115, 8S45.
Journal de Rouen.